Anne-Sophie Godon - Malakoff Humanis : « Les chefs d’entreprise nous disent être en bonne santé, mais quand nous observons plus attentivement certains indicateurs, nous remarquons des signaux d’alerte »

« Les chefs d’entreprise nous disent être en bonne santé, mais quand nous observons plus attentivement certains indicateurs, nous remarquons des signaux d’alerte »

ORGANISATION DE LA PREVENTION || Evaluation des risques
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12/05/2021
Anne-Sophie Godon - Malakoff Humanis
Anne-Sophie Godon
Directrice des services
Malakoff Humanis

Malakoff Humanis vient de dévoiler son baromètre « La santé des dirigeants des TPE/PME à l’épreuve de la crise ». Il a pour but de radioscoper les chefs d’entreprise sur toutes leurs facettes : santé, conditions de travail, conciliation vie pro/perso, confiance en eux, confiance dans leur entreprise, etc. Anne-Sophie Godon nous en dit plus.

Que nous dit ce nouveau baromètre « La santé des dirigeants des TPE/PME à l’épreuve de la crise » par rapport à celui de 2016 ?
Le baromètre avait pour but d’analyser l’impact de la crise Covid-19 sur la santé des dirigeants, sur l’activité de leur entreprise et sur leur confiance en l’avenir.
Nous notons toujours ce trait caractéristique des dirigeants : quand nous leur demandons s’ils ont l’impression d’être en bonne santé, ils sont nombreux à nous dire que oui, à nous dire qu’ils font ce qu’il faut pour avoir un mode de vie sain. Mais quand nous observons attentivement certains indicateurs, nous voyons que la réalité est plus nuancée.
Par exemple, ils sont plus nombreux à fumer qu’en 2016. 32% des dirigeants des entreprises de moins de 150 salariés nous disent fumer, contre 24% en 2016. C’est huit points de hausse. A titre de comparaison, 23 % des salariés du secteur privé sont fumeurs.  Les dirigeants sont aussi 17% à nous dire consommer de l’alcool tous les jours ou presque, contre seulement 7% chez les salariés.
D’autres indicateurs soulignent ce paradoxe. Les dirigeants sont peu nombreux à avoir consulter un médecin généraliste. 1 dirigeant sur 10 en 2020, alors que nous sommes à 35% pour les salariés !

Ces constats sont-ils généralisés ?
Nous constatons que la crise a des impacts différenciés selon les secteurs d’activité. C’est en partie lié au contexte économique, au changement de rythme, à la visibilité qu’ont les dirigeants, mais aussi aux spécificités de chaque secteur. Dans l’industrie par exemple, les dirigeants se jugent en moins bonne santé que la moyenne.
Dans le BTP où l’activité est stable, c’est plutôt l’inverse.
Le contexte économique a de nombreux impacts sur les dirigeants qui vivent au rythme de leur activité, au rythme des difficultés de leurs clients, de leurs fournisseurs, avec un impact évident sur leur état de santé physique et morale.

Vous mesurez aussi le regard des dirigeants sur la santé de leurs salariés ?
Les dirigeants sont plus nombreux à être convaincus que la santé de leurs salariés et la performance de leur entreprise sont étroitement liées. Ils étaient 62% « Tout à fait d’accord avec cette idée » en 2016 et sont 78% en 2021.
Le premier enjeu en matière de performance sociale est, selon eux, la santé et qualité de vie au travail, suivi du recrutement et de la fidélisation des talents.  

Qu’est-ce que Malakoff Humanis appelle « performance sociale » ?
La performance sociale c’est l’efficacité des actions qui sont mises en œuvre pour protéger et développer le capital humain dans les entreprises. Elle constitue le volet social de la responsabilité sociétale des entreprises. C’est un fil directeur extrêmement puissant, un des enjeux de la performance économique.
Nous avons construit un indice qui permet de mesurer les efforts que font les entreprises en matière de protection et développement de leur capital humain, ainsi que l’impact de ces efforts sur leur performance économique. Nous le déploierons prochainement et il permettra de montrer que les entreprises qui ont un bon indice de performance sociale ont une performance économique plus élevée que les autres, jusqu’à 10 points de plus.

Vous avez aussi lancé un Lab social. De quoi s’agit-il ?
Chez Malakoff Humanis nous avons fait le pari de l’intelligence collective. Nous étudions, avec nos clients, et avec des experts, les mouvements de fond qui changent profondément l’organisation du travail. Avec le Lab Social, nous lançons une démarche d’innovation ouverte dont le but est d’imaginer des solutions qui ont un impact positif pour la société, pour les entreprises et leurs parties prenantes. Nous voulons, avec ce lab, mobiliser les dirigeants mais aussi les représentants des salariés, et contribuer ainsi à enrichir le dialogue social.
Le lab social a vocation à traiter un grand nombre de sujets qui tels que la santé au travail, l’absentéisme, la transformation digitale, ou l’allongement de la durée de vie professionnelle, qui a été le retenu pour la première réunion du Lab.

Le Lab se déplacera dans les régions et nous commençons par la région PACA avec cette première thématique. Nous avons mené trois ateliers de deux journées pour identifier les sujets sur lesquels il est prioritaire de travailler.
Quatre groupes travaillent en parallèle et génèrent entre deux et trois concepts par groupe. Puis il y a un vote pour sélectionner des concepts et enfin un jury va choisir un ou deux projets à prototyper et à industrialiser.
Ce qui est intéressant dans ce lab, c’est la co-construction et la concrétisation. Nous nous donnons les moyens d ‘aller au bout, de construire des solutions avec un modèle économique, et avec des réseaux d’acteurs, qui vont porter cette solution sur le marché.
Nous sommes dans une logique d’impact sociétal, nous souhaitons contribuer, à notre niveau, à une forme de progrès social.

Et pour cela, les projets se multiplient chez Malakoff Humanis…
Oui ! Nous lançons aussi un comité de santé au travail en partenariat avec la Fédération des TPE de France. L’objectif de ce comité est d’accompagner les dirigeants de TPE dans la maîtrise des enjeux liés à la santé au travail.
Nous avons aussi publié un livre « Innovez et décrochez la lune – Guide à l’usage des entreprises » pour permettre aux entreprises d’appréhender facilement la démarche innovation. En discutant avec les dirigeants, nous avons noté combien ce sujet est crucial pour eux.  Ils se posent de nombreuses questions sur la manière de faire, sur les compétences nécessaires … Questions auxquelles nous espérons avoir répondu avec ce guide très pratique, conçu comme une boîte à outils, et qui va s’étoffer au fil de l’eau.