Jacques Devaux - Groupe ADP : « Si nous faisons comme d’habitude, les choses vont continuer. Si nous voulons aller vers le zéro accident, il faut s’investir davantage »

« Si nous faisons comme d’habitude, les choses vont continuer. Si nous voulons aller vers le zéro accident, il faut s’investir davantage »

|| Santé / Qualité de vie au travail
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05/07/2021
Jacques Devaux  - Groupe ADP
Jacques Devaux
coordinateur de la nouvelle politique Sécurité Chantiers
Groupe ADP

Le Groupe ADP vient de signer une charte sécurité sur le chantier de la future gare multimodale de l'aéroport d'Orly. Le but est de lancer une politique sécurité globale qui soit portée par le Groupe ADP. Jacques Devaux, le coordinateur de cette nouvelle politique nous en dit plus.

Parlez-nous de cette charte sécurité qui vient d’être signée.
L’idée de la charte pour le Groupe ADP est de prendre un rôle actif dans la construction de la sécurité de ses projets. Cet aspect « sécurité » semble nous manquer dans le pilotage de nos projets, d’un point de vue maitre d’ouvrage, maitre d‘œuvre.
C’est pourquoi nous avons défini toute une politique, qui vise à mettre la sécurité en priorité de nos préoccupations, à réfléchir comment nous pouvons mieux concevoir, avoir un œil avertir sur nos chantiers, détecter nos anomalies.
D’un point de vue règlementaire, il n’y a rien de nouveau. C’est plutôt la culture sécurité de l’entreprise que nous travaillons.

Quand vous dites « nous » de qui s’agit-il ?
Nous avons travaillé sur cette politique sécurité avec des collaborateurs du groupe, de la direction de l’ingénierie et de l’aménagement, depuis septembre 2020. Nous avons travaillé d’arrache-pied, sous le patronage de la direction, qui a validé les résultats de ce travail. Ce n’est donc pas quelque chose venue de consultants externes.
C’est un beau sujet la sécurité. Nous voulions avoir une charte qui vient de nous, qui nous parle, qui nous permet d’avoir notre propre mode de fonctionnement.
Nous sommes satisfaits que des groupes comme Vinci et Demathieu Bard se soient reconnus dans une telle démarche et nous aient symboliquement rejoint le jour du lancement de cette nouvelle politique.

Comment est venue l’idée de cette charte ?
Nous sommes partis d’un constat : nous n’avons pas zéro accident. Alors, comment faire pour atteindre cet objectif ? Si nous faisons comme d’habitude, ça va continuer comme ça, mais si nous voulons aller plus loin, il faut s’investir davantage.
La charte vise un objectif de zéro accident grave au 1er janvier 2023. Il faut le temps que notre politique se mette en place, qu’elle porte ses fruits. C’est ça qui doit nous porter. Evidemment nous ne tolérons aucun accident, dès maintenant.

Quels sont les 10 engagements qui composent la charte sécurité ?
La charte commence par acter la mobilisation de tous les collaborateurs sur la sécurité, y compris les managers. Nous avons la conviction que la sécurité n’est pas quelque chose qui se fait tout seul, il faut l’implication de ceux qui sont au contact du terrain, bien sûr, mais aussi du management de l’entreprise qui doit porter le sujet depuis la direction jusqu’aux opérationnels. Même le comité exécutif est concerné et reçoit nos indicateurs sécurité. Les entreprises avec qui nous travaillons sur les chantiers sont également comprises dans cette nouvelle politique.

La charte dit aussi qu’au-delà d’être vigilant, d’être force d’alerte au quotidien, il faut avoir des points de sécurité à chaque réunion de service, avoir des visites de sécurité organisées par chacun et qui visent à analyser ce qui semble être une anomalie, la faire remonter à ceux qui pilotent le projet.
La charte prévoit aussi de former nos collaborateurs. Il ne s’agit pas d’en faire des experts mais leur donner la possibilité d’avoir un bon niveau de culture sécurité, pour pouvoir faire des remarques pertinentes, être attentif et savoir de quoi nous parlons. Nous voulons que tout le monde soit en alerte. La charte prévoit d’ailleurs la remontée d’informations et le traitement systématique et pérenne des risques et situations dangereuses.

Puisque nous sommes concepteurs de nos ouvrages, la charte nous invite à nous poser la question, dès la conception de la constructibilité de ce que nous concevons, au sens sécurité. Autrement dit, se demander « qu’est-ce qu’on a fait qui a généré des risques dans la construction ou en tout cas qui a imposé des mesures de prévention parfois lourdes, alors qu’un œil avisé de concepteur on aurait pu simplifier des choses pour avoir des modes opératoires mieux maitrisés ? »

Enfin, la charte reprend aussi nos 12 standards de sécurité qui vont de l’interdiction de consommation d’alcool au port complet des EPI notamment.

Quels sont les accidents les plus fréquents sur les chantiers du Groupe ADP ?
Ce sont souvent les mains qui sont exposées. Il y a beaucoup de manœuvre de levage où les mains viennent essayer de retenir les charges. Il en résulte des doigts pincés par exemple. Les accidents surviennent plutôt lors de modes opératoires atypiques, par exemple lors du démontage d’une tour dans des conditions plus complexes que d’habitude.

Nous avons aussi des spécificités, qui dépendent d’où est le chantier. Les risques peuvent être liés aux flux de véhicules, de piétons, etc. L’environnement est dense. Lors d’un ouvrage côté piste, il faut faire attention à ne pas interférer sur la circulation des avions et la sécurité aérienne. Lors d’une extension d’ouvrage – sur des terminaux par exemple -, nous nous raccordons sur de l’existant, autrement dit, quelques mètres plus loin il y a des passagers, du bagage, de la frontière.
Tout cela demande de la rigueur. Mais il y a des procédures, les compagnons savent ce qu’il faut faire et ne pas faire. Ce sont presque des dangers « évidents » qui ne posent pas débat.