État des lieux de la santé des professionnels de santé
Le dernier rapport sur la santé des professionnels de santé démontre que les acteurs de ce métier font face à de réelles difficultés qui se répercutent sur leur bien-être. Cette étude, en plus de vouloir faire reconnaître les efforts et protéger les professionnels, donne des pistes d’amélioration.
La santé des médecins, infirmiers, étudiants et autres professionnels du secteur est mise à rude épreuve depuis plusieurs années. Le 30 mars 2023, à l’occasion du colloque « Tous acteurs de la santé des professionnels de santé », une consultation nationale portant sur « La santé des professionnels de santé » a été lancée par le ministère chargé de l’Organisation territoriale des Professions de santé. Elle était destinée à donner la parole aux professionnels afin de faire un état des lieux de leur santé et d’appréhender leurs attentes. Pour cela, les médecins Marine Crest-Guilluy, Philippe Denormandie et l’infirmier Alexis Bataille-Hembert ont mené des plusieurs entretiens et visites sur le terrain.
État de santé des professionnels de santé : un constat amer
Qu’ils soient libéraux ou non, un grand nombre de professionnels a apporté sa pierre à ce travail colossal. Au total, 48 985 contributions ont été recensées.
Le bien-être des soignants entamé
Concernant l’état de santé des acteurs de la santé, les résultats sont édifiants. Parmi les participants, 84 % déclarent travailler plus de 35 heures par semaine. Le temps moyen hebdomadaire de travail des répondants s’élève à 40,39 heures, qui dépasse ainsi la durée moyenne nationale. Il est en effet important de rappeler que les horaires atypiques, le travail le week-end, les journées de 12 heures consécutives et le travail de nuit sont inhérents au secteur de la santé. De façon logique, le rapport explique ensuite qu’une telle charge de travail « a des répercussions sur le bien-être » des travailleurs. Au moins 64 % d’entre eux « se sentent fatigués » et 79 % assurent avoir rencontré de récents problèmes de concentration.
Dans le même ordre d’idée, 77 % des sondés estiment « ne pas dormir suffisamment », 81 % pour ceux ayant des horaires atypiques. Un autre mal occasionné s’avère être le stress, fortement ressenti chez 27 % des professionnels interrogés. Des soignants qui déplorent également un déficit d’hygiène de vie, concrétisé par une plus haute fréquence d’alimentation non saine et l’absence de pratique d'activité physique régulière.
Les professionnels de santé face aux douleurs physiques
L’étude montre donc que cette cadence de travail, ce rythme si particulier des métiers médicaux, aurait un impact négatif sur la santé physique des professionnels de santé. Plus de la moitié déclarent souffrir de douleurs chroniques régulières (60 %). Des douleurs qui s’accroissent au fur et à mesure de l’avancée de la carrière (41 % des 18-25 ans en déclarent, contre 64 % des 36-50 ans et 72 % des 51-65 ans). Nous pouvons constater que les jeunes entrants ne sont pas épargnés par les rudes conséquences de leur engagement.
Enfin, le mal peut aussi être psychologique. Seulement 37 % des soignants jugent leur état de santé comme étant « bon », alors que plus de deux répondants sur dix estiment « qu’il est mauvais, voire très mauvais ».
Les attentes des professionnels de santé
En fin de questionnaire, les participants étaient amenés à émettre des propositions de mesures à adopter dans l’optique d’améliorer la santé des soignants. L’occasion pour eux d’offrir un spectre précis de leurs attentes.
Reconnaître et sensibiliser sur la santé fragile des soignants
Apparaît alors nettement une volonté de faire changer les choses. Et pour cela, la reconnaissance des professionnels de santé a été identifiée comme un axe d’amélioration (26 % des contributions). Selon les professionnels, des efforts devraient être faits pour « une meilleure rémunération » (15%), ou un meilleur management. La « valorisation sociétale » ressort également de plusieurs témoignages (13%). Le sujet de la santé des professionnels de santé devrait être « une priorité du système de santé publique français », et ce, « à tous les niveaux », dit le rapport. Les soignants insistent également sur la nécessité de « sensibiliser » tous les échelons de la profession aux difficultés ressenties mais aussi aux solutions déjà existantes pour veiller à sa propre santé. Des pistes de réflexion, qui imprègnent bien les esprits. Plus d’un tiers des contributions portait sur la façon de prendre davantage soin de soi (38 %), en travaillant sur la pression et le stress du quotidien (15 %).
Organiser un meilleur accès aux soins pour les professionnels de santé
Mais l’élément qui se distingue nettement est l’envie de changement d’organisation du travail. Parmi les contributions recueillies, près de la moitié en faisait état (49 %). Les professions médicales insistent particulièrement sur ce point (56 %). Selon les auteurs du rapport, « repenser l’organisation de l’offre de médecine de santé » permettrait de « prévenir les risques professionnels ».
De même, cela leur apparaît essentiel de mieux « organiser un accès et une offre de prévention et de soins à tous les professionnels de santé ». Ou tout du moins de l’encourager. Un besoin que 15 % des contributeurs ont mis en avant. Si la quasi-totalité des répondants ont un médecin traitant, 42 % des contributeurs indiquent tout de même ne pas pouvoir y avoir recours. L’accès à la médecine du travail n’est donc pas systématique. Et pourtant, selon la synthèse de ce travail d’enquête, engager des actions en faveur de la santé de ces professionnels « bénéficierait au quotidien de travail en créant les conditions favorables d’exercice et de bienveillance dans un environnement où la notion de prévention est centrale. Une forme de juste retour, individuel et collectif, pour toutes celles et ceux qui soignent les autres ».
En savoir plus :
Découvrir en détails le « Rapport sur la santé des professionnels de santé », octobre 2023
