L’affaire FNAC permet de comprendre ce qui est réellement attendu de l’employeur en matière de prévention. Conformément, à ce que prévoit l’article L. 4121-2 du Code du travail, l’employeur doit montrer qu’en amont de la réorganisation, il a évalué tous les risques du projet en termes de santé-sécurité au travail non seulement pour les salariés « sortants » mais aussi pour les salariés « rescapés » du PSE.
Dans ce contexte, la surcharge de travail découlant de la suppression de postes est un risque qu’il va falloir évaluer qualitativement mais aussi quantitativement et de manière chiffrée. A la suite de cette évaluation, il devra bâtir un plan d’action suffisamment concret pour supprimer le risque pathogène. Il devra ensuite consulter le CHSCT qui pourra librement émettre un avis sur cette évaluation et le caractère satisfaisant ou non des mesures proposées par l’employeur. Pour émettre son avis de façon éclairé, le recours à un expert, financé par l’employeur, est d’ailleurs largement ouvert au CHSCT (Cass. soc. 26 janv. 2012, n° 10.12.183).
En définitive, quand un PSE est projeté, la gestion du risque psychosocial ne doit pas se cantonner à des mesures d’accompagnement individuel des salariés (mise en place, par exemple, de cellules d’écoute ou d’un recours à des psychologues). Une réorganisation collective de travail cohérente en termes de santé au travail doit être envisagée.
Si l’employeur
ne tient pas compte du risque et de l’avis du CHSCT, il s’expose
à une menace de contentieux non négligeable : sur le plan
collectif tout d’abord, puisque, comme nous venons de le
voir, les représentants du personnel pourront demander, en
urgence, la suspension du plan qu’ils estiment pathogène.
Sur le plan individuel ensuite, car, si un salarié est touché, il pourra engager la responsabilité civile de l’employeur sur le fondement de la faute inexcusable en faisant valoir que la politique de surcharge auquel il a été soumis est à l’origine d’une détérioration de son état de santé. En effet, à partir du moment où l’employeur a eu conscience du danger auquel est exposé un salarié et n’a pas pris les mesures pour faire cesser le risque, sa responsabilité est engagée (Cass. 2ème civ., 8 nov 2012. , n° 11-23.855).
On l’aura compris la question des réorganisations d’entreprise ne
doit pas seulement être envisagée en termes financier et d’impact
sur le volume de l’emploi. Il faut également introduire au cœur
du débat et bien en amont dans la réflexion, la répercussion qu’a
cette réorganisation sur les conditions de travail et la qualité
de vie au travail.
Il s’agit, pour les décideurs, d’un vrai changement de
perspective !
Dossier réalisé avec l’aimable collaboration de Wolters Kluver France