Les injonctions à être heureux au travail, qui caractérisent le nouveau management, engendrent paradoxalement une fragilisation physique et psychique des travailleurs, qui ne parviennent pas à cet objectif illusoire.
En effet, ne pas y arriver, ou ne pas réussir à tenir ce paraître émotionnel sur la durée, devient une non-compétence, un stigmate de faillibilité personnelle. Selon les rhétoriques managériales, la solution repose sur le seul individu auquel il s’agit de fournir des outils d’autodiagnostic, d’autothérapie « clés en main » à travers une litanie de bons-mots-bien-dits-bien-faisants qui modifie en profondeur nos rapports au travail avec une focale exclusive : celle de l’individualisation responsabilisante.
Des spécialistes issus de différentes disciplines des sciences
humaines et sociales analysent les transformations du monde du
travail et leurs effets sur la santé. Si le mal-être et la
souffrance s’accroissent statistiquement dans la réalité des
entreprises, mais aussi des services publics, c’est probablement
parce que le bonheur prescrit n’est qu’une coquille vide masquant
un délitement des conditions, une perte de sens de son travail,
l’invisibilité progressive de ce qui constitue le cœur de son
métier.