Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce projet ?
Lors d’une conférence, Aude Selly est venue témoigner de tout ce
qu’elle a vécu. Elle était dans une grosse boite, elle était très
investie dans son travail. Et puis d’un coup, cela n’a plus
marché, son corps n’a plus suivi. Elle en est même venue à
attenter à ses jours. Tout cela, elle l’a expliqué dans son
livre. Son histoire personnelle est très forte, et très
importante.
Comme je suis très sensible à l’outil théâtral, j’ai demandé si je pouvais m’en inspirer pour créer la pièce. Aude et l’éditeur m’ont donné leur accord, donc j’ai pu me pencher là-dessus. J'aborde la question du burn-out grâce au théâtre, car une pièce permet de mettre en avant une situation réelle et d'y faire adhérer l'auditoire en suscitant dans le public de l’émotion, pour provoquer une réflexion et pourquoi par une mise en œuvre d’actions préventives. Ce sujet-là m'a beaucoup inspiré parce que nous vivons depuis un moment des temps difficiles. Les gens ont besoin de contact avec les autres, pour partager un peu les choses qu'elles vivent tous les jours.
Comment s'est passé le processus d'adaptation, pour ne
trahir ni le matériau de base ni la réalité du burn-out
?
Je me suis beaucoup inspiré du livre d’Aude Selly ; tous les
dialogues sont issus de celui-ci. Mais j’ai pris le parti de
changer un petit peu la chronologie des événements, et j’ai fait
le choix de dédoubler le personnage principal, parce que c’était
trop difficile à porter pour une seule comédienne. Cela crée
également un effet miroir. Vous savez, lorsqu’on est mal dans sa
peau, on se regarde, on s’auto-critique, on voit tous ses
défauts… Ce personnage s’observe et témoigne en permanence, à la
fois sur ses symptômes et son parcours. On rentre dans les
détails avec le management, les nouvelles directions, et son
investissement qui prend le pas. Dans cette pièce, on ne critique
vraiment pas l’entreprise. D’ailleurs, le personnage principal, à
travers les deux actrices, se demande vraiment à qui la faute.
Puisque ce n’est ni la faute de celui qui travaille ni la faute
de celui qui la dirige. C’est tout un système qui se met en
place.
Quels ont été les retours ?
Beaucoup d’émotion. La pièce touche tout le monde du travail. À
la fin, nous renvoyons la balle au public, en demandant des
solutions, des partages d’expériences… Cela lance le débat. Et le
public reste souvent muet pendant les cinq premières minutes,
mais personne ne s’en va. Les gens ont besoin de souffler. Les
gens ne sont plus les mêmes, ils réfléchissent. Parce que rien ne
sera plus efficace que l’émotion pour sensibiliser. J’ai même eu
des managers et des dirigeants qui sont venus me remercier.
Quelle suite souhaitez-vous donner à cette pièce
?
Nous avons des représentations à Paris, et nous en avons fait une
en Suisse. Nous espérons continuer, et je propose à de nombreux
organismes professionnels de jouer la pièce pour eux, mais j’ai
également d’autres projets qui ne sont pas liés au burn-out. Mais
il faut absolument rentrer dans le partage, car il y a un grand
intérêt et une véritable demande d’actions.