Prévention du stress mais pas que…, l’exemple de l’accord Air France-KLM

Par Alain Benlezar, Responsable Corporate qualité de vie au travail, AIR France KLM

DOSSIER
ORGANISATION DE LA PREVENTION || Management SST / 21/03/2013

Alain Benlezar, Responsable Corporate qualité de vie au travail, AIR France KLM revient sur l’accord de prévention du stress au travail signé au sein du groupe qui a permis d’englober un ensemble de facteurs entraînant de la souffrance au travail.


Un accord qui va bien au-delà de la prévention du stress : souffrance au travail, harcèlement, addictions…

Xavier Darcos avait souhaité que les entreprises de plus de 1 000 salariés négocient, soit un accord, soit un plan d’action pour la prévention du stress au travail. Nous l’avons anticipé.
Nous avons décidé de prendre en charge non seulement le stress mais également les troubles psychotraumatiques, le burn-out, la prévention des conduites suicidaires, les violences externes (passagers ou clients incivils ou violents), les violences internes (harcèlements morals et sexuels).
La négociation de cet accord a démarré en novembre 2009 et s’est conclue en mars 2010. Nous avions déjà négocié en 2003 et en 2008 des chartes de prévention des harcèlements au travail avec les partenaires sociaux. Nous ne partions pas de rien, nous avions toute une histoire.
Nous nous sommes rendus compte qu’à l’expérience de la première charte, sur 8 cas de salariés qui se plaignaient d’être victimes de harcèlement, de fait, ils étaient en souffrance au travail.
Nous avions également négocié en 2008 une charte de prévention des risques liés à l’alcool. Nous avions dans ce cadre modifié notre règlement intérieur pour avoir une tolérance zéro : aucune circulation, mise à disposition, vente de boissons alcoolisées dans l’entreprise, y compris dans les restaurants gérés par les CE ou par l’employeur lui-même.
Nous avons également dû évaluer et éliminer les impacts humains dans les projets de changement. Une entreprise comme la nôtre avait en moyenne 300 projets de changement par an, certains mineurs, d’autres très importants.
De plus, nous sommes en train de réorganiser l’entreprise. Nous avons un plan de départ volontaire de 5 122 salariés. Cela suscite des inquiétudes, voire de l’anxiété, parfois même de la dépression. Nous devons prendre en compte ces éléments-là, et ce le plus en amont possible.
Pour cela, il faut disposer de diagnostics partagés au plus près du terrain, intégrer la prévention des risques psychosociaux dans les politiques de ressources humaines, professionnaliser la chaîne d’acteurs et en particulier les managers de proximité.

Prévention du stressLa concrétisation de l’accord au quotidien

D’abord, nous avons mis en place des groupes pluridisciplinaires, un au niveau corporate et un dans chaque établissement. Pendant presque un an, nous avons sillonné la France et les différents sites d’Air France pour présenter, sensibiliser et demander l’implication de tous pour développer les mesures contenues dans cet accord. Ensuite, nous avons partagé avec les partenaires sociaux des fiches d’actions pratiques pour les managers.
Nous avons créé un site intraligne « Qualité de vie au travail » autour de quatre dimensions : prévention des risques physiques, prévention des risques psychiques, santé au travail, mieux vivre au travail.
Nous avons mis aussi en place une méthodologie de renseignement du Document Unique sur les risques psychosociaux, extrêmement précise et très engageante. Notre objectif était que ce Document Unique ne soit pas vécu comme une contrainte légale, mais comme un outil et un tableau de bord pour tous les acteurs.
Nous avons mis en place un dispositif d’évaluation et de suivi du stress professionnel qui mesure le stress, l’anxiété, la dépression, en corrélation avec 29 stresseurs professionnels (classeur de bonnes pratiques pour aider les managers). Cet outil de diagnostic est basé sur le volontariat et l’anonymat, géré par la médecine du travail. Ce questionnaire en ligne tourne autour de 100 questions. Cet outil n’est pas uniquement fait pour mesurer. C’est un outil d’aide à l’action.
Nous avons mis en place une méthodologie d’évaluation des impacts humains dans les projets de changement à l’aide d’une grille de cotation de l’impact. On demande aux chefs de projet et à leur équipe, à partir d’une grille -toujours les 29 stresseurs- de dire si, en termes de contexte organisationnel, sur la clarté des rôles, les démarches contradictoires, les gestions du changement, cela aurait un impact « très négatif », « négatif », « sans impact », « plutôt positif » ou « réellement positif ? ».
Nous avons mis en place des modules de formation sur la prévention du harcèlement au travail, la gestion de la prévention des violences et incivilités, le management par la qualité de vie au travail. Ce dernier module de formation s’articule en plusieurs axes : « Moi, manager, comment je dois connaître les facteurs de risques psychosociaux ? Comment moi, manager, je dois éviter d’en générer pour mon équipe et moi-même ? Comment moi, manager, je dois utiliser des leviers pour développer la qualité de vie au travail autour de la reconnaissance, le dialogue, la proximité, la conciliation vie professionnelle/vie privée ?

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