Philippe Douillet - ANACT : Les entreprises ont besoin d’outils pour la prévention des risques psychosociaux

Les entreprises ont besoin d’outils pour la prévention des risques psychosociaux

MANAGEMENT RH / QVT || Risques psychosociaux
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21/02/2014
Philippe Douillet - ANACT
Philippe Douillet
chargé de mission, chef de projet "Prévention des RPS"
ANACT
Les risques psychosociaux sont aujourd'hui bien intégrés dans le paysage de la prévention. Toutefois, beaucoup d'entreprises manquent de méthodes pour engager des plans d'actions. Philippe Douillet a étudié les conditions de la réussite d'une démarche de prévention des RPS. Il nous en expose les principes.

Où en est la prévention des risques psychosociaux dans les entreprises ?
Il y a maintenant une dizaine d'années que le sujet des risques psychosociaux (RPS) a émergé. Il est aujourd'hui clairement entré dans les politiques de prévention des grandes entreprises et de plus en plus, également dans les PME.
L'étape de la sensibilisation et de l'information est largement franchie. Nous devons aujourd'hui consolider les outils et méthodes mis à disposition des entreprises pour prévenir les RPS. Ceux-ci doivent être bien adaptés à chaque contexte et permettre de comprendre les causes profondes des situations de mal-être des salariés issus de dysfonctionnements organisationnels.
A partir des interventions du réseau ANACT dans des dizaines d'entreprises, nous avons pu dégager certaines lignes d'action primordiales pour mettre en œuvre une politique de prévention durable des RPS.

Comment identifier et agir sur les causes des risques psychosociaux ?
Les situations de souffrance au travail peuvent presque toujours être reliées à un problème d'organisation du travail. Au départ, il y a un écart semblant insurmontable entre les exigences du travail et les ressources mises à disposition pour l'exécuter. Pour agir sur cette tension et la diminuer, nous avons développé une méthodologie basée sur l'analyse des "situations-problème", situations ressenties comme significatives de débordements, de conflit, etc. A partir de l'étude de ces situations, on remonte le fil jusqu'à identifier un problème d'organisation. Cette analyse doit se faire à partir de situations très concrètes et dans le cadre d'un travail collaboratif entre employeurs et salariés.
Sur le sujet des RPS, s’il faut bien entendre l’expression des salariés en termes de souffrance, je suis profondément convaincu qu'il faut travailler en s’appuyant  aussi sur une vision positive du travail comme facteur de réalisation de soi. L'objectif étant alors d'aider à trouver les compromis permettant aux  salariés d’accomplir leurs activités dans les meilleures conditions possibles de ressources pour réussir un travail de qualité dans lequel ils pourront se reconnaître. La performance est aussi à ce prix. C'est aussi tout l'objet de l'outil C2R (Contraintes, Ressources et Régulation) développé par l'ANACT.

Quelles pistes d'actions préconisez-vous pour construire durablement une politique de prévention des risques psychosociaux ?
 Au-delà du diagnostic RPS, la prévention doit effectivement être installée durablement. Trois axes d'action peuvent être retenus.
Le premier, c'est l'existence d'un processus d'évaluation et l’intégration des RPS au Document Unique qui permet de stabiliser une démarche d’analyse. Pour cela il me paraît indispensable de s'appuyer sur une instance paritaire de suivi et d'évaluation qui puisse piloter l'ensemble de la démarche.
L'expression des salariés et le management du travail sont la deuxième condition de l'inscription dans le temps de la prévention des RPS. Les salariés doivent avoir la possibilité de s'exprimer sur leur travail, la vie de leur entreprise et les projets qui les concernent. Il y a nécessité d'ouvrir des espaces de dialogue. Il faut également repositionner le rôle du management en tant que vecteur d'animation et de régulation des équipes au quotidien.
Enfin, la conduite des changements doit systématiquement être accompagnée d'une réflexion, en amont, sur les conséquences en termes d’effets sur la santé mentale. Cela passe par la formation des concepteurs et managers et la mise en œuvre d'un processus organisé de gestion de projet
La prévention des RPS est encore jeune dans les entreprises, de nombreuses expérimentations sont menées avec des effets et impacts intéressants en termes de transformation et de dialogue social. Il sera indispensable d'étudier les résultats de ces démarches dans le temps pour évaluer les transformations d’organisation effectivement réalisées.

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