Dessinateur dans un bureau d’études hospitalier, Denis Garnier est devenu syndicaliste au niveau local, départemental, régional puis national. Écrivain, auteur d’un blog pour FO-santé, il est aujourd’hui chargé du secteur de la prévention des risques et des conditions de travail des personnels hospitaliers pour cette même fédération. Il siège également à la commission CHSCT du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière et au comité technique de la Caisse nationale d’assurance maladie. Il revient pour nous sur les difficiles conditions de travail des personnels de santé et les évolutions attendues, débats qu’il a lui-même ouverts lors des conférences qu’il anime aux Congrès de Préventica.
Préventica - Quel est le rôle joué par
FO-santé dans le débat actuel des conditions de
travail ?
Denis Garnier - FO-santé représente un secteur
qui compte 1,5 million de salariés dans les cliniques, hôpitaux,
maisons de retraite, établissements sociaux et médicaux sociaux…
À ce titre, sa voix est importante dans la défense des intérêts
des personnels du secteur. Elle œuvre notamment à faire connaître
la réalité des conditions de travail dans la fonction publique
hospitalière, préjudiciable à la santé des professionnels et à
celle des malades. Par exemple et selon les médecins du secteur,
en réorganisant les urgences, on pourrait éviter 1 000 morts
par an !
Prév. - La santé au travail est-elle votre principale
revendication actuellement ?
D.G. - Assurément ! La situation des
personnels de santé au regard des conditions de travail et
d’emploi est difficile, dans tous les secteurs de la santé.
Plusieurs réformes visant la rationalisation managériale dans les
établissements de santé ont abouti à un durcissement budgétaire,
une réduction du personnel qualifié, entrainant de fait, une
augmentation des accidents du travail, des maladies
professionnelles, des pathologies liées au stress et à
l’épuisement… L’absentéisme prend des proportions énormes :
on estime à 95 000 le nombre de personnes absentes de leur
poste chaque jour pour raisons de santé.
Paradoxalement, la culture de prévention est absente des
établissements de soins. Notre rôle est donc de pallier ce
manque, de provoquer la synergie des compétences pour que,
au-delà des effets d’annonce et des outils créés, mais
sous-utilisés, la situation se débloque.
Prév. - De quels outils parlez-vous ?
D.G. - Les accords de novembre 2009, le guide de
prévention des RPS dans la Fonction publique (FO participe à son
élaboration) sont des outils dans le sens où ils apportent une
méthodologie aux employeurs. La démarche est positive. Les
pouvoirs publics, les employeurs, les organisations syndicales
travaillent de concert à l’élaboration de dispositifs qui vont
vraiment dans le bon sens : évocation des RPS, de la
pénibilité, l’accréditation en cours d‘élaboration par la Haute
Autorité de Santé prendra en compte la qualité des conditions de
travail dans l’offre de soins. Mais encore faut-il qu’ils soient
accompagnés de véritables moyens pour être applicables.
Prév. -Que peut faire le syndicat à son
niveau ?
D.G. - FO-santé est
partie prenante de l’ensemble des actions qui conduisent à
l’amélioration des conditions de travail : convaincre les
pouvoirs publics de donner des moyens supplémentaires, apporter
des connaissances aux salariés, développer leur prise de
conscience sur les difficultés et la réalité des choses,
développer le respect à tous les niveaux, car l’hôpital est
devenu une zone franche, une zone de non-droit ! Notre force
est d’être très ancrés dans la réalité du terrain : nous
sommes ainsi à même de faire remonter les expériences,
« raconter » le travail dans les hôpitaux et les
cliniques dans ses bons et ses mauvais côtés.
Prév. - C’est le sens de votre présence à
Préventica ?
D.G. - FO-Santé
participe en effet à Préventica, car le Congrès/Salon est devenu
le rendez-vous de ceux qui veulent améliorer les choses !
Nous voulons porter notre point de vue partout où l’on parle de
risques
professionnels. Nous animons des conférences dans lesquelles
nous racontons très concrètement, à partir de témoignages, la vie
de l’hôpital, des maisons de retraite, des cliniques… Ainsi, en
début d’année à Bordeaux, nous avons développé les thématiques de
l’approche globale et intégrée des risques dans les
établissements de santé (en collaboration avec Préventique
Sécurité), de la prévention des risques dès la conception des
bâtiments (à partir d’un retour d’expérience de l’hôpital de
Carcassonne). Nous avons aussi abordé les conséquences de
l’économie sur le monde du travail.
Notre propos est de profiter de cette tribune exceptionnelle
d’expression pour donner des exemples concrets de démarches qui
fonctionnent. Parler des problèmes, non pas pour être alarmiste,
mais pour donner envie aux employeurs d’investir dans la
prévention, une affaire rentable !