Quelle est votre profession ?
Je suis psychologue du travail et consultante : je fais de
l’accompagnement individuel au sein de mon cabinet et
j’accompagne également les organisations ainsi que leurs
salariés.
Je reçois des patients en consultation sur des thématiques en
lien avec la souffrance au travail ou pour traiter des
traumatismes au sens large (en lien ou non avec le travail).
L’autre partie de mon activité est l’accompagnement en
entreprise. J’accompagne ces structures dans leurs audits,
démarches QVCT ou encore en matière de prévention des risques
psychosociaux. J’accompagne également les managers sur
différentes thématiques telles que l’organisation du travail, la
promotion du bien-être au travail.
Qu’est-ce qu’un psychologue du travail peut apporter à
une entreprise ? Quel est son rôle ?
Il y a des psychologues du travail qui sont salariés d’une
entreprise et qui vont donc travailler par exemple sur des
recrutements ou sur l’accompagnement de professionnels. Il existe
aussi des psychologues du travail qui sont externes à
l’entreprise, comme moi, et qui sont amenés à intervenir sur
plusieurs projets. Il m’arrive personnellement d’accompagner des
dirigeants sur de la stratégie RH ou des salariés en souffrance.
J’interviens aussi sur les questions d’organisation du travail,
c’est essentiel pour éviter les burn-out ou la souffrance au
travail.
Où est-ce qu’on en est aujourd’hui en matière de
souffrance au travail ? Est-ce que c’est quelque chose de répandu
?
Je reçois personnellement de plus en plus de patients en
souffrance au travail. Il y a d’ailleurs deux typologies : ceux
qui viennent parce qu’ils ne se sentent pas bien mais qui ne sont
pas encore arrêtés et ceux qui ont été arrêtés par leur médecin
pour burn-out. Ça touche toutes les catégories, je peux recevoir
des ouvrier.ère.s, des aides-soignant.e.s, des DRH et même des
directeurs généraux.
Je crois que les personnes concernées par la souffrance au
travail sont de plus en plus nombreuses mais hélas, je n’arrive
pas à toucher tout le monde parce que venir voir un psychologue
en ville représente un coût et tout le monde n’a pas les moyens,
ni l’envie, de venir en consultation.
Quel type d’accompagnement proposez-vous ?
J’accompagne mes patients à titre individuel quand ils viennent
au cabinet. En premier lieu, j’apporte des éléments d’éclairage
en les aidant à comprendre les facteurs qui ont été pathogènes
pour leur santé mentale au travail. L’idée est de les aider à
prendre de la distance, à déculpabiliser et à déconstruire ce
qu’ils ont vécu. En second lieu, j’aide les salariés à mettre en
place des stratégies de défense pour que la reprise du travail se
passe bien ou se passe au mieux.
Lorsque j’interviens en entreprise, on est davantage sur de
l’accompagnement collectif de salariés. Je travaille aussi sur
l’accompagnement des managers parce que, malheureusement, il y en
a beaucoup qui ne sont pas formés au management ce qui peut
causer des dégâts pour les personnes qu’ils ont à encadrer et
pour eux-mêmes.
J’accompagne également les ressources humaines et les managers
dans la mise en place d’une stratégie de prévention des risques
psychosociaux.
Quels conseils donnez-vous aux managers pour éviter que
des situations pareilles se produisent ?
Ce que je répète toujours aux managers c’est : soyez proches de
votre équipe. Et pour cela, il faut aller sur le terrain. C’est
en se rendant sur place, auprès de ses collaborateurs, qu’on
prend conscience de la réalité. Aussi, il est important de ne pas
attendre les entretiens annuels d’évaluation pour connaître les
besoins et ressentis des équipes. Pour cela, il convient de les
questionner régulièrement à l’occasion de discussions
individuelles.
Comment se fait-ce qu’il n’y ait pas de profils comme le
vôtre dans chaque entreprise ?
Je crois que le mot « psychologie » fait peur. Je pense
personnellement que beaucoup d’entreprises préfèrent faire appel
à des coachs professionnels parce que c’est plus tendance et leur
approche est souvent orientée solution. Généralement quand on va
voir un psychologue c’est quand il y a un problème. Le coaching
quant lui a cette image de progression. C’est paradoxal parce que
pour pouvoir proposer une solution, il faut d’abord savoir ce qui
ne va pas.
Quel est le point clé à travailler pour chaque entreprise
?
Je reste convaincue qu’une entreprise saine avec des conditions
de travail et des modes de management bienveillant sera plus
performante tout simplement parce que les salariés s’y sentiront
bien et seront motivés pour réaliser leurs tâches. Travailler sur
la qualité des conditions de travail est donc une stratégie à
intégrer dans toutes entreprises.