Une brève histoire de l’organisation du travail

DOSSIER
MANAGEMENT RH / QVT || Management RH / 07/06/2021

travail garage ancien

Bien que la notion de travail - ou bien celles antérieures d’ouvrage et de labeur - existe depuis de nombreux siècles, la recherche d’une efficience pour produire en grande quantité et l’étude de ce sujet prend principalement ses origines en 1776, dans les travaux de l’économiste britannique Adam Smith. Celui-ci, figure majeure de l’histoire économique, fut un des premiers à démontrer les avantages d’une division du travail au sein d’une structure spécialisée. Selon lui, en attribuant à chaque employé une tâche précise dans la fabrication d’un produit, cette dernière sera réalisée bien plus rapidement et efficacement. Une théorie en partie reprise, en 1911, par l’américain Frederic Winslow Taylor, à l’origine du taylorisme. Pour cet ingénieur, la division du travail n’est pas encore assez efficace, du fait d’ouvriers trop qualifiés qui restent libres de leur temps et de leur savoir-faire. Il formule alors les principes de son organisation scientifique du travail, reposant sur une division horizontale du travail où chaque employé ne doit réaliser que des tâches élémentaires, la suppression des gestes inutiles et la recherche de la manière la plus efficace pour chaque employé, « the one best way ».  Apparaît également une division entre les exécutants et une direction chargée d’analyser la productivité et d’organiser le travail.
Une théorie qui trouve sa voie auprès d’Henry Ford, à l’origine du fordisme, qui ajoute aux principes de Taylor la présence d’une chaîne de montage, apportant directement les pièces nécessaires aux ouvriers pour que ceux-ci n’aient plus à se déplacer de leur poste de travail. Le travail d’usine à grande échelle et la consommation de masse font alors une entrée fracassante sur la scène mondiale. Néanmoins, la sociologie des années 30 poursuit les études sur les sphères de travail et commence à relever les limites de cette organisation scientifique, mettant en avant la dimension sociale des entreprises et l’importance du moral et du bien-être des ouvriers sur le rendement. Le taylorisme et le fordisme sont de plus en plus accusés de déshumaniser les ouvriers, en les considérant essentiellement comme des outils remplaçables.

productivité


Quelques formes hybrides apparaissent alors, telles des déclinaisons de ces théories fondatrices, jusqu’à ce que s’impose dans les années 1960 le toyotisme, ou lean management. Basé également sur la recherche primaire de la meilleure rentabilité, ce modèle né dans les usines Toyota repose essentiellement sur la réduction drastique du gaspillage. Les quantités commandées et produites sont calculées en fonction de la demande, et tout est réalisé pour s’épargner le maximum de frais inutiles, dont une automatisation progressive des machines. Dans ce modèle cependant, les qualifications individuelles sont valorisées et la création d’un esprit d’entreprise se place au cœur de la pensée. Les sentiments d’appartenance à un groupe, de fierté, et d’investissement pour l’entreprise sont stimulés pour créer l’émulation et booster la productivité. Mais là encore, des critiques apparaissent, portant notamment sur l’exigence de cadences de plus en plus intenables et une pression constante pour l’adhésion et le sacrifice au profit de l’entreprise.

Aujourd’hui, l’époque est à l’expérimentation. La flexibilité et la polyvalence sont désormais des compétences très recherchées, face à une automatisation permettant en théorie de réaliser les tâches les plus simples. La ligne autrefois nette entre exécutants et managers tend à devenir plus poreuse, permettant des modèles plus participatifs, moins descendants. Enfin, les valeurs de l’entreprise et le bien-être au travail sont aujourd’hui des facteurs clés pour rejoindre ou non une entreprise, les nouveaux travailleurs plaçant le sentiment d’accomplissement parmi leurs préoccupations principales dans la recherche d’emploi.

Depuis sa survenue, la crise sanitaire du COVID-19 a profondément questionné les organisations, mettant en exergue les limites de certains modèles et invitant de nombreuses entreprises à mettre en doute la pertinence de leurs modes de travail. S’il est encore un peu tôt pour savoir si cela aura des impacts à long terme sur notre manière de travailler et de concevoir l’entreprise, il est certain que la pandémie a enclenché une nouvelle réflexion.

PARTAGEZ :