Concernant la santé des femmes au travail, où en sommes-nous du point de vue du droit ?
Concernant la prise en considération dans le monde du travail de tout ce qui attrait à la santé des femmes, le point d’entrée est toujours le même : le Code du travail est trop peu bavard, pour ne pas dire silencieux. Si l’on prend les grands sujets « (congés menstruels, ménopause, endométriose, ndlr) il n’existe aucune disposition.
Pourquoi un tel silence ?
Le travail n’étant que le reflet de la société au sens large, la santé des femmes y reste assez taboue. Mais c’est surtout politique. Ce sont des questions d’arbitrage politique et d’orientations parlementaires. Des propositions ont été faites mais ont eu du mal à aboutir. Ces sujets ne sont tout simplement pas priorisés.
Rien n’est donc prévu pour améliorer les conditions de travail des femmes en entreprise ?
Des choses ont été expérimentées concernant le congé menstruel par exemple, parce que l’on en a plus parlé à une certaine période. Même si l’on accuse un retard par rapport à d’autres pays européens. Il y a aussi le cas particulier de l’allaitement, car des dispositions sont prévues par la loi mais mériteraient un coup de neuf. En fait, l’employeur n’est tenu de mettre à disposition un local pour allaiter, que s’il est mis en demeure par l’Inspection du travail de le faire. Cette nuance est importante.
N’y a-t-il donc rien que les collaboratrices puissent faire pour se faire entendre et surtout comprendre ?
Il n’y a quasiment pas de leviers juridiques, effectivement. Le Code du travail impose seulement aux employeurs de négocier ou de dialoguer sur ces sujets. Cela reste compliqué de les contraindre à prendre des mesures. C’est un pur exercice de dialogue social : il est donc important d’avoir des représentants du personnels et syndicaux sur le terrain qui puissent porter les revendications des travailleuses.
Aux entreprises donc de briser les tabous ?
Le silence du législateur commence à être suppléé par les partenaires sociaux et le dialogue social. Ces dernières années, des entreprises sont de plus en plus ouvertes à ces sujets là. Elles le prennent sous l’angle de l’amélioration de la Qualité de vie et des conditions de travail, la fameuse QVCT. C’est un nouveau point d’entrée. Pour les employeurs, il peut y avoir un double intérêt de s’emparer de ces sujets : l’amélioration de leur attractivité et la fidélisation du personnel. Pour l’heure, nous restons sur un statut quo, une phase d’entreprises laboratoires. Mais il faut être optimiste sur ces sujets : on en parle. Nous sommes au début de quelque chose. Nous gagnerons du terrain en libérant la parole.
En savoir plus :
- « Congé menstruel : où en sommes-nous ? », article d’Axel Wantz
- « Endométriose : comment les entreprises peuvent-elles améliorer sa prise en compte ? », par les Éditions Tissot
- « Proposition de loi visant à améliorer la sensibilisation et la prévention de la ménopause : les mesures intéressant les salariées et les entreprises », article des Éditions Tissot