Quel portrait dressez-vous aujourd’hui du bien-être au
travail ?
De manière générale, je pense qu’il existe des situations assez
diversifiées. Le contexte actuel, marqué par la crise sanitaire
et le recours massif au télétravail, a été vécu très différemment
en fonction des gens. Certains sont très heureux de cette
nouvelle liberté et de ce qu’elle permet. D’autres, au contraire,
vivent cela très mal, car ils sont en manque de relations avec
leurs équipes, et sont hyperconnectés en permanence. Il n’y a pas
de réalité unique. Ce constat est lié à plein de choses : la
façon dont l’entreprise gère tout cela, mais également des
facteurs personnels, etc.
Néanmoins, je pense qu’il y a une véritable prise de conscience
sur le fait que le bien-être au travail est un sujet essentiel.
En plus, c’est très bénéfique pour la performance, comme cela a
été prouvé par de nombreuses études très sérieuses. De plus en
plus d’entreprises lancent donc de vraies initiatives, alors que
par le passé cela pouvait sembler anecdotique.
Qu’est-ce qui définit selon vous le bien-être au travail
?
Quand on veut s’intéresser au bonheur au travail, il faut
s’intéresser à toutes ses dimensions :
- Il y a une dimension émotionnelle. Pour être heureux au travail, nous avons besoin d’avoir trois fois plus d’émotions positives que d’émotions négatives lors de notre activité.
- Il y a également le bien-être cognitif. C’est-à-dire être satisfait de notre situation, et pouvoir se dire que notre entreprise nous permet d’atteindre nos objectifs.
- Une autre dimension, c’est ce qu’on appelle le bien-être aspirationnel, qui correspond au sens. Estimer que notre travail fait sens, et éprouver un sentiment d’appartenance à un groupe qui partage nos valeurs.
- Enfin, il me paraît important d’ajouter le bien-être physique.
Quelles actions concrètes les organisations peuvent-elles
mettre en place ?
Je crois qu’il n’y a pas de « recette magique » qui marcherait
pour toutes les organisations, c’est réellement du cas par cas.
Il est intéressant de commencer par un diagnostic, pour
comprendre quels sont les axes de travail principaux et les
leviers d’action sur lesquels on peut agir en priorité. Je pense
également qu’il est essentiel de travailler en intelligence
collective, en impliquant le plus de collaborateurs possible.
Ensuite, c’est un travail d’accompagnement collectif. Il est
également possible de donner des clés aux collaborateurs, pour
les former sur certaines thématiques. Évidemment, tout dépend de
ce qui a déjà été fait dans l’entreprise, et de ses besoins.
Quels sont les écueils à éviter ?
L’erreur principale serait de se dire « on va entreprendre une
démarche de bonheur au travail » pour ne faire que des actions de
façade. Cela ne va avoir qu’un effet contre-productif, car tout
le monde se rendra bien compte qu’il ne s’agit pas d’une démarche
authentique. Il faut écouter les salariés, les faire
participer.
Le développement du poste de "chief happiness officer" dans
certaines organisations peut également avoir des effets négatifs
si l'entreprise considère que celui-ci doit être le seul
responsable du bien-être au travail, et se décharge ainsi de sa
responsabilité. Chacun est coresponsable du bien-être de ses
collègues.
Le but du livre « I Feel Good », c'est vraiment de donner des
clés. À la fois pour neutraliser les émotions négatives, mais
aussi pour enclencher une « contagion positive » grâce à une
méthode et des rituels simples que l’on peut pratiquer entre
collègues.