En avant-première à Préventica Lyon, un serious game destiné aux apprentis du BTP
Chargée de mission communication et action sociale
FONDATION DU BTP
Préventica - Dites-nous quelques mots sur la Fondation du BTP et ses missions ?
Henrianne ESPAIGNET - La Fondation du BTP a pour mission de promouvoir des œuvres sociales pour les acteurs du BTP de la région Rhône-Alpes et du département de la Saône-et-Loire. Ses administrateurs ont retenu trois orientations : la prévention des risques professionnels, la solidarité entre les générations (formation des jeunes, aide aux retraités...) et la promotion des métiers du BTP, ainsi que la lutte contre l'exclusion (handicap, chômage, difficultés sociales ou financières). Reconnue d’utilité publique depuis 2004, elle intervient par des subventions de mécénat ou le déblocage de fonds d’entraide individuelle.
Nous avons conçu et déployé une opération de prévention d’envergure : PACTE BTP. Depuis 2006, nous sensibilisons, avec un CD-ROM interactif et la signature d’un contrat de bonnes pratiques, les salariés des entreprises et les jeunes en formation aux dangers de la route. À ce jour, nous totalisons près de 44 000 inscriptions et de nouvelles demandes nous arrivent très régulièrement.
En 2009, nous avons été alertés par les médecins du travail, représentants des entreprises et directeurs de CFA sur les problèmes d’addiction (drogues et alcool) et le manque d’outils pour prévenir ces risques. Après avoir vérifié le réel besoin et consulté les études disponibles, nous avons choisi de cibler notre action sur les jeunes et réfléchi à une action innovante.
Prév - C’est ainsi que vous avez présenté en avant-première à Préventica Lyon un serious game destiné aux apprentis du BTP. En quoi consiste cette opération ?
H.E. - « Premiers Combats » est un jeu vidéo en ligne à vocation pédagogique. Il a été conçu pour être ludique et faire passer des messages sur les risques liés à la consommation d’alcool et de drogues. Non moralisateur, notre propos n’est pas de diaboliser, mais de montrer les conséquences et dangers des excès : nous illustrons notre propos par des situations familières aux jeunes des centres de formation et aux apprentis. Nous avons travaillé avec un expert en prévention pour trouver le ton juste.
Prév - Pourquoi une telle démarche de sensibilisation aux addictions ?
H.E. - À l’origine de cette opération : une demande pressante des professionnels de la prévention des risques en entreprises et des dirigeants des sociétés du BTP. Les consommations de drogues et d'alcool sont un véritable problème chez les jeunes (pas seulement dans le secteur du bâtiment d’ailleurs) et il n’existait pas d’outils de sensibilisation.
Quelques chiffres issus de récentes études attestent de l’étendue du problème : plus d’un apprenti sur deux fume (proportion plus importante que chez les autres jeunes), ils connaissent des situations d’ivresse plus fréquentes (1 fois par semaine pour 1 garçon sur 2), la consommation de cannabis jugée « problématique » (fumer seul, fumer le matin…) concerne 1 apprenti sur 5 et, parmi ces consommateurs, 1 sur 4 a eu un accident du travail.
Contrairement à l’alcool, facile à repérer, la drogue est perverse : sa consommation ne se remarque pas forcément au premier abord. Sans compter la potentielle dépendance, elle peut avoir des effets à long terme. La prise d’ecstasy le week-end par exemple, a parfois des effets plusieurs jours après et dans le cadre du travail. Autre point spécifique : nos apprentis passent les 2/3 de leur temps en entreprise et sont payés. Ils sont donc des cibles privilégiées pour les revendeurs.
Prév - Pour quelle raison avoir choisi de le présenter sous ce format ?
H.E. - Le serious game s’est imposé comme une évidence. Les jeunes y sont particulièrement sensibles et l’objectif de notre démarche était de trouver un moyen de communication qui leur correspondait. Nous avons beaucoup travaillé pour adapter au mieux le discours. Ainsi, nous avons fait appel aux 140 CFA de la région qui ont proposé des scénarios (nous avons pris des idées dans chacun d’entre eux). Puis, nous avons travaillé avec les sociétés lyonnaises Les Tanukis - spécialisée dans les jeux vidéo - et Akitsu, pour l’expertise et le bien-fondé des messages, avec le concours d'un expert en addictologie qui nous a accompagnés pour la connaissance des différentes drogues et de leurs effets.
Prév - Expliquez-nous ce que l’on trouve dans ce jeu ?
H.E. - Il s’agit d’une série sous forme de vidéos qui raconte l’histoire de Nicolas, apprenti en CFA. Le joueur, en caméra subjective, tient le rôle de ce personnage, passionné de boxe et qui semble avoir un secret à cacher. Au cours du jeu, les tentations seront nombreuses (alcool, drogues) et le joueur s’apercevra que toutes ses décisions ont des conséquences. La plus radicale est un game over. Les scènes du jeu ont été tournées dans des centres d’apprentissage et les élèves ont joué leurs propres rôles. Le jeu est programmé pour plusieurs saisons, mais seule la première est pour le moment disponible. Nous attendons les avis et commentaires des utilisateurs pour réaliser les suivantes.
Le serious game a été dévoilé à Préventica Lyon lors d’une conférence le 28 septembre en présence de nos partenaires et des représentants de toutes les organisations professionnelles régionales.
Prév - Où va-t-on le trouver ensuite ?
H.E. - Totalement gratuit, « Premiers Combats » est pour le moment réservé aux apprentis du BTP de la région Rhône-Alpes. 15 établissements sont pilotes (environ 9 000 jeunes) : dans chacun, un référent (« entraîneur ») va remettre un code d’accès aux jeunes. Munis de celui-ci, ils sont pouvoir jouer en ligne sur un site dédié, soit à titre individuel, soit en classe dans le cadre d’un projet pédagogique.
Une page Facebook permet aux joueurs de créer une communauté et des challenges vont être organisés.
Nous souhaitons ensuite étendre l’opération aux autres établissements du BTP de Rhône-Alpes et Saône-et-Loire et pourquoi pas, plus tard, à la France entière. Nous comptons sur les premiers utilisateurs pour faire connaitre cet outil et impulsons d’ores et déjà une importante campagne de communication.
Prév - Est-ce pour cette raison que vous avez choisi d’organiser le lancement de cette opération à Préventica Lyon ?
H.E. - Nous connaissons bien le Congrès / Salon pour y avoir déjà participé à deux reprises. C’est un événement qui rassemble un large public, issu de tous les secteurs d’activité et très sensibilisé aux différents risques professionnels. Il nous semblait pertinent de leur faire connaître notre serious game dès sa sortie : toutes les entreprises sont potentiellement concernées dès lors qu’elles accueillent des apprentis. Notre participation à Préventica était donc une évidence !