Pourquoi avoir choisi le thème “Rendons le travail
parlant” pour la 12e semaine Qualité de vie au travail
?
Le réseau Anact-Aract a choisi de placer les
espaces de discussion au cœur de cette 12e édition de la
Semaine pour la qualité de vie au travail en écho à une double
observation.
En premier lieu car de tels espaces font, à l’heure actuelle,
majoritairement défaut au sein des entreprises, alors même que
nous constatons à travers nos expérimentations que la résolution
des problèmes du quotidien passe inévitablement par la prise de
parole des différents acteurs sur les conditions de réalisation
de leur travail. Les organisations se privent ici d’un levier de
performance majeur…
Et ensuite parce que le développement de lieux où discuter
librement des sujets liés au travail constitue une véritable
attente sociale. Celle-ci se fait particulièrement ressentir dans
des environnements de travail confrontés à des transformations
constantes, qui génèrent inquiétudes chez les salariés.
L’Anact promeut la généralisation de ces espaces pour ces
raisons, et veille à accompagner les entreprises en mettant à
leur disposition des outils, conseils et éléments de méthodologie
adaptés. Bien sûr, l’Anact ne peut agir seule et c’est tout un
écosystème qu’il faut créer autour des espaces de discussion afin
d’assurer la montée en compétence de tous les acteurs qui doivent
y être associés. Les espaces de discussion sont un moyen
d’accéder à de l’information et une compréhension que
l’entreprise a aujourd’hui perdues, un vecteur de connaissance
des conditions réelles du travail et, a fortiori, de leur
amélioration, sans équivalent.
Une opportunité majeure en somme, que les entreprises doivent
désormais saisir.
Quels sont les principaux enseignements à retenir du
sondage réalisé par Harris ?
Nous en tirons
deux enseignements majeurs.
Le premier enseignement : parler de son travail
constitue une difficulté pour près d’un tiers des
salariés. Si 68 % des répondants indiquent pouvoir
parler facilement de leur travail au sein de leur entreprise ou
administration, 31 % font état de difficultés. Ces échanges ont
lieu en priorité avec les collègues proches, et avec les managers
directs.
Les discussions concernent le plus souvent des sujets
« terrain » et quotidiens : ambiance de travail
(67 %), l’environnement de travail et les moyens mis à
disposition des salariés (67 %) ou encore les difficultés
rencontrées dans le travail au quotidien (65 %).
Enfin, le dialogue a le plus souvent lieu de manière informelle,
quel que soit l’interlocuteur.
Le second enseignement : les espaces de discussion
restent à imaginer et à développer, mais ils doivent
obligatoirement déboucher sur des améliorations
concrètes
Seules 23 % des personnes interrogées font
état de l’existence d’espaces de discussion au sein de leur
entreprise, alors même que 94 % des répondants estiment que la
mise en place de tels espaces est une bonne chose ! Pour
autant, les salariés peinent à dessiner une image précise de ce
que devrait être l’espace de discussion idéal. Toutefois,
une large majorité des salariés insistent sur la
nécessité que ces espaces débouchent sur des améliorations
concrètes (93 %) et qu’ils doivent s’ouvrir à tous
(90 %).
Pourquoi et comment discuter du travail ?
L’évolution des entreprises, des organisations, de notre modèle
productif, de la nature même du travail, du dialogue social et
des pratiques managériales, impose l’émergence de nouveaux
équilibres pour articuler simultanément la performance des
entreprises et la qualité de vie au travail des salariés.
La création d’espaces de discussion sur la réalité du travail au
quotidien constitue une réponse adaptée pour face à des enjeux de
régulation au plus près du terrain. Les entreprises accompagnées
par le réseau Anact-Aract montrent que ces espaces sont le lieu
d’un dialogue professionnel qui a vocation à compléter, nourrir
et enrichir le dialogue social traditionnel. En effet, nous ne
travaillons jamais seuls et pour nous seuls : que ce soit
avec ou pour quelqu’un, la nature même du travail implique que
l’on en parle.
La mise en place d’espaces de discussion devrait être une
disposition naturelle pour l’entreprise et le manager, mais tend
à disparaître. Bien pensés en amont, en se posant la question de
leur finalité, de leur articulation avec l’organisation et de
leurs objectifs, avec une ingénierie ad hoc, ces espaces
favorisent l’émergence d’améliorations dans l’environnement, les
moyens, les processus du travail et, in fine, d’une
production optimisée. L’Anact a, à partir de projets pilotes
menés en entreprises, élaboré sa propre vision des espaces
de discussion : « Il s’agit d’espaces collectifs
qui permettent une discussion centrée sur l’expérience de travail
et ses enjeux, les règles de métier, le sens de l’activité, les
ressources, les contraintes. Cette discussion se déroule suivant
des règles coconstruites avec les parties prenantes. Les espaces
de discussion sont inscrits dans l’organisation du travail, ils
s’articulent avec les processus de management et les institutions
représentatives du personnel et visent à produire des
propositions d’amélioration, des décisions concrètes sur la façon
de travailler. »Afin que la discussion sur le travail
s’inscrive dans une logique de transformation, des conditions
précises de mise en œuvre, d’animation et de production sont
requises. L’Anact préconise une méthodologie pour instaurer des
espaces de discussion de manière structurée et pérenne. Cette
démarche distingue 4 temps-clés : Il faut
d’abord analyser le contexte de l’entreprise, définir la finalité
de l’espace créé au regard des autres lieux d’échanges existant
déjà, puis faire le lien avec ces derniers. Il s’agit ensuite de
construire une ingénierie qui ne soit pas rigide mais pas non
plus purement informelle qu’il convient d’expérimenter,
évaluer, et déployer. C’est à ses conditions qu’une entreprise
construira des espaces de discussions efficaces.
Comment appliquer ces préconisations dans les petites
entreprises ?
Nous avons pu constater que des PME
mettaient elles aussi en place ce type d’espaces quand le besoin
s’en faisait ressentir. Nous l’avons même rencontré dans une
pâtisserie de 9 salariés, dans laquelle l’employeur voulait
instaurer un nouveau dialogue pour améliorer tout à la fois
l’ambiance de travail et ses ventes, en associant les salariés
aux processus de décisions d’aménagements du laboratoire, de
l’espace de vente, des horaires d’ouverture, etc. Pour s’en
donner les moyens, il a décidé de fermer l’établissement tous les
lundi de 11 heures à midi afin de réunir toute son équipe. C’est
une décision très forte, qui montre l’engagement du responsable,
sa conviction mais aussi le fait que c’est à la portée d’une
petite entreprise.