Selon vous, que recouvre la notion de « sens au travail »
? Quel lien entretient-elle avec le bien-être des travailleurs
?
C’est une notion qui diffère en fonction des individus. Chacun
possède sa propre définition. Les réalités sont donc très
différentes en fonction des organisations, mais celles-ci doivent
se questionner sur ce qui fait sens au travail en leur sein, au
quotidien. Dans une entreprise dite « à impact », cela peut
sembler assez évident, mais ce n’est pas parce qu’une
organisation n’appartient pas à cette catégorie que le travail
n’a pas de sens. Les travailleurs vont en trouver un, qui peut
différer de la définition commune et générale. Et c’est important
de laisser cela comme ça, car le contraire pousserait des gens à
perdre sens dans leur travail, car celui-ci n’obéirait pas aux
critères communs. L’approche objective du sens au travail
n’existe pas. C’est pourquoi chaque organisation doit le poser la
question de ce qui fait sens pour elle et ses collaborateurs.
Tous les indicateurs semblent montrer que la crise
sanitaire a accéléré une « crise du sens au travail ». Comment
expliquez-vous cela ?
Nous pouvons considérer que trois facteurs majeurs sont à l’œuvre
pour une grande majorité de la population :
- la confrontation à la mort. Le traumatisme de cette situation
amène naturellement à se questionner sur le sens de son quotidien
et de ses actions.
- un changement complet du mode de fonctionnement de la société
et du travail. La crise sanitaire a plus ou moins détruit ce qui
marchait, sans proposer de nouveaux modèles.
- une situation économique incertaine, avec de fortes tensions
qui apportent leur lot d’incertitudes.
Vis-à-vis de la crise sanitaire, tout cela s’est un petit peu
résolu progressivement, mais nous n’avons pas eu le temps de le
constater, car la guerre en Ukraine et ses conséquences ainsi que
la crise écologique occupent désormais les esprits.
Comment prévenir la perte de sens ?
Tout d’abord, avec sincérité et transparence ; c’est la base. Il
faut « ouvrir les vannes » et prendre en compte ce phénomène dans
chaque organisation. Il faut questionner les collaborateurs et
trouver des solutions avec eux. Il ne faut pas leur demander
pourquoi ils ne veulent pas travailler, mais ce qui leur donne
envie de travailler. Ce qui fait sens dans leur quotidien et leur
apporte du bien-être.
De manière générale, je suis plutôt optimiste par rapport à la
suite, parce que les grands bouleversements sont normaux. Les
transitions apportent des tendances lourdes positives, et il faut
faire confiance dans les individus pour trouver des
solutions.
