Les entreprises sont-elles bien préparées pour gérer un
problème d’addiction ?
Avant de répondre à votre question, il est important de resituer
l’ampleur du phénomène des addictions. On estime que 10 à 30%
(selon si on y inclut le tabac ou pas) des Français souffrent
d’une addiction. 10%, cela veut dire que dans une entreprise de
10 personnes, on a un risque très important de trouver une
personne souffrant d’addiction. Et parfois plus selon les
secteurs d’activités, lorsque les conditions de travail sont
difficiles.
Dans les grandes entreprises, il existe généralement une
politique de santé au travail qui intègre la prévention des
addictions. On va savoir plus facilement comment détecter et
aider une personne souffrant d’addiction.
Dans les TPE et PME, la plupart du temps, le dirigeant n’est
absolument pas préparé à faire face à ce type de situation. Or en
cas de problème de comportement sur le lieu de travail, il vaut
mieux avoir anticipé plutôt que de gérer une crise.
Comment mettre en place une politique de prévention des
addictions ?
La première difficulté est de vaincre le tabou des addictions.
Notre société n’est pas à l’aise avec cela, surtout avec
l’alcool. Autant la prévention du tabagisme est désormais
socialement acceptée et l’entreprise va pouvoir faire passer ses
actions facilement dans un objectif de bien-être, autant regarder
en face qu’un salarié a un problème d’alcoolisme est plus
difficile à accepter.
Pourquoi cette chape de plomb sur les problèmes d’alcool ?
Parce que l’alcool est synonyme de convivialité, parce que les
troubles du comportement liés à une consommation excessive sont
visibles voire dérangeants, parce que cela pose des questions sur
les facteurs qui peuvent conduire à cette consommation excessive,
parce que c’est mauvais pour l’image de l’entreprise…
Il est très difficile de parler à un collègue que l’on voit en
souffrance. Mais c’est beaucoup plus simple s’il y a une vraie
politique de prévention des addictions construite à 3 :
Employeur, Médecin du Travail et Syndicats. Ensemble, on va
pouvoir analyser les facteurs addictogènes dans l’entreprise
(stress, souffrance physique ou psychique, usages …), voir
comment anticiper, et trouver des relais pour se faire aider sur
son territoire, comme les Aract, les consultations d’addictologie
des hôpitaux, les CSAPA (Centres de Soin, d'Accompagnement et de
Prévention en Addictologie) …
Que faire pour aider un collègue en
difficulté ?
Lorsqu’il y a situation de crise et ivresse sur le lieu de
travail, il faut le sortir de son poste de travail et
éventuellement l'accompagner à la médecine du travail. Et ne pas
oublier de l’empêcher de prendre sa voiture et le raccompagner
chez lui. C’est le lendemain que l’on pourra essayer de lui
parler et poser objectivement les problèmes que pose son
comportement sans le stigmatiser.
Il convient également d'avoir des procédures, construites avec
les représentants du personnel et connues de l'encadrement, pour
les personnes ayant une consommation excessive et chronique.
Il existe aujourd’hui des outils pour aider les entreprises,
quelle que soit leur taille, à anticiper ces situations : le
portail Addict’Aide Travail propose ainsi des tests
d’auto-évaluation, des ressources documentaires, un annuaire
géolocalisé des soignants…
La prévention des addictions est un sujet de société important
mais il doit aussi devenir un sujet de santé au travail à part
entière.
