Organisme sans but lucratif créé en 2004, le Groupe Entreprises
en Santé soutient les entreprises dans l’intégration des
meilleures pratiques de la santé globale au travail au Québec.
Roger Bertrand, instigateur du groupe et de la norme du même nom,
nous explique l’importance de la santé et de la sécurité au
travail au Québec.
Préventica : Parlez-nous de ce Groupe Entreprises
Santé
Roger BERTRAND - C’est un organisme sans but
lucratif qui a vu le jour en 2004. Il est à l’origine de la norme
BNQ 9700-800 « Prévention, promotion et pratiques
organisationnelles favorables à la santé en milieu de travail »,
également appelée « Entreprise en santé », développée par le
Bureau de Normalisation du Québec. Cette norme a pour objectif de
maintenir et d’améliorer durablement l’état de santé des
travailleurs et la compétitivité des entreprises. Tel que le
laisse entrevoir son intitulé, elle fait le lien entre santé au
travail et développement durable, problématique mise à l’honneur
cette année lors de la Journée mondiale de la sécurité et de la
santé au travail.
Préventica - Le 28 avril célèbre chaque année la sécurité
et la santé au travail. Que signifie cette journée au
Québec ?
Roger BERTRAND - Concernant la Journée mondiale
au Québec, l'Assemblée Nationale a décrété en 2010 cette date du
28 avril comme étant le Jour commémoratif des personnes décédées
ou blessées au travail. Elle est surtout l’occasion d'honorer la
mémoire des personnes qui sont décédées au travail. Elle se veut
une incitation à la réflexion et à l'action pour éliminer les
dangers, contrôler les risques présents dans nos milieux de
travail et bâtir une culture de prévention.
Elle n’est donc pas consacrée spécifiquement « à la
promotion de la sécurité et de la santé au travail (SST) dans une
économie verte ».
Néanmoins, plusieurs événements SST d’envergure sont organisés en
région au cours de ce printemps, notamment le Forum Santé et
Sécurité au Travail (25 avril à Québec).
Prév. - Le Groupe Entreprises en Santé
est-il mobilisé pour l’occasion ?
R.B. - Nous sommes mobilisés chaque jour de
l’année, mais pas spécialement le 28 avril. Nous cautionnons bien
entendu l’initiative : la Journée mondiale permet de mettre
en lumière des initiatives du monde entier. De la même manière
que notre démarche « entreprise en santé » est
inspirante pour nombre de pays (la France notamment), nous avons
aussi à apprendre des autres pour encore l’améliorer et mieux
accompagner les entreprises.
Prév. La santé-sécurité au travail semble très intégrée
dans le modèle économique québécois. Expliquez-nous.
R.B. - En effet, la santé et la sécurité au
travail sont très enracinées dans le fonctionnement économique.
La législation en la matière, bien que datant à l’origine de la
fin des années ’70 est plutôt bien respectée dans les
entreprises et mise à jour régulièrement.
Longtemps ministre responsable de la santé publique au Québec, je
suis, pour ma part, convaincu que cette dernière doit être prise
en compte très en amont. Or, la population adulte passe une bonne
partie de sa vie sur le lieu de travail. C’est donc là qu’il faut
agir en priorité ! C’est mon leitmotiv aujourd’hui, via le
groupe Entreprise en Santé dont je suis co-fondateur. Et pour
faire réagir les acteurs économiques, il faut penser la
prévention en terme de rentabilité. Au Québec, les organisations
publiques et privées, services sociaux, assurances, l’on bien
compris. Le paritarisme est particulièrement puissant en
matière de santé et sécurité du travail - la problématique est
largement débattue lors de tables rondes réunissant patronat et
représentants des salariés - on peut dire que les choses avancent
en accord avec toutes les parties, mais selon une logique
davantage de protection que de promotion-prévention. Tout de
même, la sensibilisation sur l’axe promotion-prévention progresse
bien, plusieurs centaines d’organisations ont entrepris une
démarche structurée visant la santé globale, dont vingt-trois
entreprises qui ont été déjà certifiées « Entreprises en
Santé », la moitié au niveau Élite.
Prév. Cette norme « entreprises en santé » ne
rejoint-elle pas la thématique de la journée mondiale de la
sécurité et de la santé au travail 2012 :
« Promouvoir la sécurité et la santé dans une
économie verte » ?
R.B. - Tout à fait. Et, à ce sujet, nous étions
un peu en avance au Québec puisque l’an dernier, à l'invitation
de l'Association française de normalisation (AFNOR), le BNQ
(Bureau de normalisation du Québec) a présenté, à Bordeaux, dans
le cadre de la Journée mondiale de la santé et la sécurité au
travail, l’innovation que constituent cette norme et son
application comme action concrète de développement durable au
sein des organisations (sujet également abordé à Préventica
Bordeaux en février 2012).
La norme « entreprise en santé » intègre, en effet,
dans les pratiques de gestion des entreprises québécoises,
plusieurs des principes de santé et de qualité de vie qui sont
édictés dans la Loi sur le développement durable : recherche
et accès équitable à une bonne santé et une meilleure qualité de
vie des individus, participation/engagement (vision concertée du
développement, des opinions et des choix éclairés favorables à la
qualité de vie des communautés), acquisition continue des
connaissances afin d’améliorer l’impact des décisions sur la
qualité de vie (partage du savoir dans un esprit d’équité et de
participation de la société civile), partage équitable des
pouvoirs et responsabilités, action préventive vis-à-vis des
risques connus (mesures d’atténuation et de corrections à la
source), adoption du principe de précaution, internationalisation
des coûts.
Ainsi, lorsque l’on agit pour améliorer la santé des salariés en
entreprises selon les principes de la démarche « entreprise
en santé », on a déjà fait la moitié du chemin vers le
développement durable ! C’est un argument de poids au
Québec où le développement durable et l’écologie sont une
obligation réglementaire. Les organisations du secteur public,
par exemple, doivent expliquer dans leur rapport annuel, les
actions entreprises pour atteindre les objectifs fixés par la Loi
sur le développement durable. C’est donc une préoccupation
constante, partagée, qui plus est, par tous les Québécois,
particulièrement sensibles à ces thématiques.