Dans l’histoire de la médecine du travail, où situez-vous
le principal virage dans le rapport du médecin avec le salarié
?
C’est en 2004 que notre rôle a fondamentalement évolué. Depuis
1946, date de la création de la médecine du travail, les
associations de médecine du travail avaient vécu sur leurs acquis
et s’étaient principalement consacrées à la réalisation des
visites médicales obligatoires.
Le décret du 28 juillet 2004 a introduit la pluridisciplinarité,
permettant de réunir des compétences médicales, techniques et
organisationnelles au service de la prévention des risques
professionnels.
Du statut de « contrôleur », nous sommes alors
véritablement passés à celui d’acteur de la prévention.
Dès cette époque, l’AST 62-59 s’est d’ailleurs largement investie
dans la constitution d’une équipe pluridisciplinaire et nous y
comptons aujourd’hui 37 personnes parmi lesquelles des
infirmières bien sûr mais également des formateurs, des
métrologues, des toxicologues, des ergonomes, des
nutritionnistes…
Accentuer cette dimension pluridisciplinaire dans la
réforme de la médecine du travail de juillet 2011 était-il alors
vraiment nécessaire ?
Oui car depuis 2004, les risques professionnels ont profondément
évolué avec l’émergence des TMS (Troubles Musculo-Squelettiques)
et des RPS (Risques Psycho-Sociaux). Le décret de janvier 2012 a
d’ailleurs introduit la notion de santé mentale en santé au
travail.
La réforme de 2011 a renforcé la dynamique de prévention en
créant de véritables équipes de santé au travail autour du
médecin du travail. La visite médicale n’est plus le pivot, elles
ne représentent aujourd’hui plus que 50% de notre activité.
Il y a vraiment une volonté d’être au plus près du terrain, des
entreprises et des salariés pour répondre à leurs besoins dans le
domaine de la prévention des risques professionnels. Nous
essayons de mieux toucher les TPE et PME qui sont souvent les
moins armées pour prévenir les accidents du travail et maladies
professionnelles.
Les employeurs ont aujourd’hui pleinement conscience de
l’importance de la santé et de la sécurité au travail, tant en
termes de responsabilité humaine et pénale que d’impact
financier. La prévention est un véritable investissement
productif, le message commence à être entendu.
Quels sont les projets prioritaires de votre association
d’ici à la fin de l’année 2013 ?
En premier lieu, continuer à privilégier la prévention à l’aide
d’équipes santé au travail pilotées par le médecin du travail
encadrant des salariés pluridisciplinaires (infirmier(e)s,
assistant(e)s en santé au travail..), et puis développer encore
notre présence sur le terrain et renforcer l’efficacité du réseau
de prévention sur la région. Nous sommes d’ailleurs en phase de
négociation du CPOM (Contrat Pluriannuel d’Objectifs et de
Moyens) avec la CARSAT Nord-Picardie et la DIRECCTE Nord-Pas de
Calais. Ce CPOM devrait plus particulièrement mettre l’accent sur
trois axes de travail :
- le diagnostic et l’évaluation des risques professionnels,
- la substitution dans les situations de risques TMS (Troubles Musculo-Squelettiques), CMR (Produits Cancérogènes Mutagènes ou Toxiques pour la Reproduction) et RPS
- le maintien dans l’emploi des salariés confrontés à une
pathologie grave ou à une inaptitude
- AST 62-59
- Décret n°2004-760 du 28 juillet 2004 relatif à la réforme de la médecine du travail et modifiant le code du travail
- Loi N°2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du Travail
- Décret 2012-135 du 30 janvier 2012 relatif à l’organisation de la médecine du travail
- Décret 2012-137 du 30 janvier 2012 relatif à l’organisation et au fonctionnement des services de santé au travail
- Arrêté du 2 mai 2012 relatif à l’abrogation de diverses dispositions sur la surveillance médicale renforcée des travailleurs