Plans de restructurations de rentrée : n’oublions pas l’impact sur les conditions de travail !

ORGANISATION DE LA PREVENTION || Management SST
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24/07/2020 - Sébastien MILLET

C’est un peu comme le calme avant la tempête. Les mesures mises en place pour mettre l’économie sous « anesthésie générale » pendant l’état d’urgence sanitaire ne vont manifestement pas suffire à éviter une vague de défaillances d’entreprises au cours des prochains mois.


Tous les indicateurs anticipent ainsi de nombreux licenciements pour motif économique à la rentrée 2020.

Beaucoup d’entreprises jouent actuellement leur survie et doivent se restructurer pour adapter leur organisation aux nouvelles réalités économiques.

Il va sans dire qu’il faudra dans ce contexte « penser à ceux qui partent », mais également « accompagner ceux qui restent ».

Les stratégies de réorganisation ne peuvent raisonnablement être basées sur une approche exclusivement financière, et doivent intégrer la préservation du capital humain, ce qui vise tant les compétences professionnelles et le savoir-faire que la protection de la santé, notamment psychique des collaborateurs.

Occulter l’impact social des réorganisations sur les conditions de travail, de santé et de sécurité, c’est prendre le risque de répercussions négatives à effet différé, dont l’entreprise peut avoir du mal à se relever, comme le montre l’expérience.

Bien sûr, la priorité restera de sauver l’activité et les emplois, mais il ne faut pas faire éluder l’enjeu d’évaluation et de prévention des risques psychosociaux qu’une réorganisation à marche forcée va généralement générer.

Les facteurs de risque sont bien connus, et alimentent régulièrement le contentieux judiciaire civil, mais aussi pénal : transferts de charges de travail, situation de précarité économique, etc.

Cela est amplifié par le contexte de crise sanitaire qui est source d’anxiété et de stress dans l’exécution du travail comme on a pu le voir à l’occasion de la reprise d’activité dans les entreprises et du déconfinement.

En soi, le changement n’est pas un problème, le tout étant de bien l’accompagner avec une vision de moyen et long terme. Comme a justement dit Francis Blanche, « mieux vaut penser le changement que changer le pansement » !

L’accompagnement des transformations n’est toutefois pas une science exacte, tant socialement que juridiquement.

Certes, le cadre de la démarche pour l’employeur est un peu plus souple aujourd’hui, avec moins de complexité procédurale depuis la mise en place des CSE (instance unique), et une évolution en matière d’obligation de sécurité qui permet de mieux prendre en compte l’effectivité des actions de prévention déployées.

Pour autant, cela ne doit pas occulter le fait que les tribunaux judiciaires peuvent opérer un contrôle des choix et décisions organisationnelles de l’entreprise, et ordonner à une entreprise de faire « machine arrière » si des mesures envisagées ou mises en place ont pour effet de compromettre la sécurité ou la santé -notamment mentale- des salariés.

La jurisprudence SNECMA a probablement encore de beaux jours devant elle, et il ne faut pas penser qu’au nom du contexte économique, les réorganisations pourront se faire au détriment des conditions de travail …

Mieux vaut bien l’anticiper, à commencer sous l’angle de l’évaluation des risques. L’entreprise sera alors en meilleure position pour défendre, avec ses conseils, ses choix décisionnels.