Préventica - Pouvez-vous nous présenter la
Mutuelle Nationale Territoriale (MNT) ?
Patrick DOS - La Mutuelle Nationale Territoriale
est une mutuelle professionnelle, née en 1964 de la fusion des
mutuelles de villes et gérée par des agents territoriaux élus et
bénévoles. Je suis moi-même retraité de la
Fonction publique territoriale (FPT), ce qui me permet
d’avoir une vision très large du métier : du point de vue
des usagers et de celui des prestataires.
Nous sommes accompagnés dans nos missions par des professionnels
qui assurent le bon fonctionnement des services des 83 sections
départementales (France métropolitaine et DOM) et 1 500
conseillers de section élus à l’écoute des adhérents. La MNT
compte aujourd’hui 752 000 adhérents (1 120 000
personnes protégées) sur 1,8 million d’agents territoriaux que
compte que la FPT. Elle est la première mutuelle de la Fonction
publique territoriale.
Prév. - Quel est son positionnement auprès des
collectivités ?
P.DOS - Une mutuelle a la possibilité d’agir
selon deux axes. Le premier, inhérent à notre cœur de métier,
consiste à encaisser les cotisations et reverser des prestations
(complémentaires santé, garantie de maintien de salaire…).
Le rôle de la MNT, et c’est là toute notre différence, va bien
plus loin. En tant qu’acteur de la Fonction publique territoriale
nous avons également un rôle à jouer en ce qui concerne
l’évolution de la santé au travail dans les collectivités. Nous
pouvons intervenir à plusieurs niveaux : prévention de la
santé en général, prévention et traitement de l’absentéisme (aide
à un retour durable au travail, aménagement du poste,
reclassement…). La FPT compte plus de 250 métiers différents. Les
métiers à risque y sont donc plus nombreux que dans d’autres
secteurs d’activité et certaines professions ont de réelles
conséquences sur la santé des agents. Notre propos, expliquant de
fait notre rapprochement avec Préventica, est de mettre la
prévention de tous les risques et la santé de tous les agents au
premier plan des préoccupations.
Prév. - De quelle manière
agissez-vous ?
P.DOS - Nous avons, par exemple, mené récemment
une étude sur les métiers de la petite enfance dans la Fonction
publique territoriale. Les arrêts de travail y sont plus nombreux
qu’ailleurs et le taux d’absentéisme important. Nous avons essayé
de déterminer à partir de quel âge survenaient les problèmes afin
de proposer aux collectivités des outils et méthodes permettant
les évolutions de carrière : reconversion, passage de
concours… Mais, avant toute chose, il est nécessaire de mettre en
place des indicateurs précis en amont. Pour ce faire, la
collectivité a souvent besoin d’être accompagnée et c’est ce que
nous faisons.
Prév. - Est-ce ce même souci d’engagement qui a guidé la
création du « Prix Santé au Travail de la Fonction publique
territoriale » ?
P.DOS - Oui bien sûr. Durant les dernières
années, nous avons constaté une plus grande sensibilisation de la
FPT à la prévention des risques, encore accrue avec la signature
de l’accord sur la santé et la sécurité au travail dans les 3
fonctions publiques du 20 novembre 2009. Dans le même temps,
l’absentéisme a augmenté. Il atteint aujourd’hui 8 %
(15 % dans les grandes collectivités, 3,5 % dans les
petites). La question s’est donc posée de savoir comment limiter,
voire inverser cette tendance. De fait, il a fallu s’interroger
sur la santé au travail. Les carrières sont plus longues, la
population active a vieilli (fort recrutement des années 80 dans
la FPT), 77 % des agents de la Fonction publique
territoriale occupent des postes de catégorie C (davantage soumis
aux risques physiques), les incivilités des usagers et le stress
augmentent… La nécessité d’agir pour réduire la pénibilité et
préserver la santé des agents territoriaux est devenue une
évidence pour tout le monde. Mais que faire ?
Nous avons donc souhaité mettre en lumière des actions déjà mises
en place dans les collectivités. Objectif : faire connaître
et reconnaître les actions de prévention et de bien-être au
travail, favoriser des échanges entre les différentes
collectivités.
Prév. - Quel est le bilan de cette première
édition ?
Très positif. 34 collectivités ont répondu à l’appel et présenté
leurs actions. Nous avons récompensé cinq d’entre elles (3 prix,
2 mentions spéciales). Je suis particulièrement surpris de la
qualité des dossiers et de la très grande variété des actions.
Ceci prouve le dynamisme des collectivités et l’étendue des
possibilités d’actions, quelle que soit la taille de la
structure : de toutes petites collectivités ont présenté des
actions particulièrement pertinentes.
Prév. - Pouvons-nous revenir sur les trois prix décernés.
Qu'est-ce qui a fait la différence ?
P.DOS - Plusieurs éléments ont retenu notre
attention : la pertinence de l’action, le caractère innovant
et original des démarches participatives et les résultats bien
sûr !
Montataire dans l’Oise (320 agents pour environ 20 000
habitants) a ainsi pris conscience des difficultés au travail des
personnels des écoles maternelles (apparition de pathologies
liées à l’âge, absentéisme, TMS…) : à partir d’un état des
lieux précis, ces derniers ont bénéficié d’un suivi à long terme,
de formations préventives « bons gestes et bonnes
postures », de l’installation d’un mobilier plus adapté…
Autre structure récompensée : la collectivité de
Villeurbanne (plus de 2 000 agents). À l’honneur : la
prévention des risques psychosociaux. Le parti pris a été
d’observer et comprendre le malaise des agents afin de leur
apporter une réponse probante. La démarche illustre une manière
de développer une approche collective à partir de l’étude de cas
particuliers.
La ville de Clermont-Ferrand a, quant à elle, choisi de porter
ses efforts sur une réduction de la pénibilité au travail. À
partir d’une tentative de rapprochement des risques à la fois
physiques et psychiques, les préventeurs se sont intéressés à
l’absentéisme, à l’ergonomie des lieux de travail, au bien-être
professionnel…
Mais ceci ne constitue qu’une infime partie de ce qu’il est
possible de faire. Nous aurions pu décerner beaucoup d’autres
prix, tant le dynamisme et l’inventivité des collectivités sont
importants.
Prév. - Preuve en est d’ailleurs votre propos au
Congrès/Salon Préventica de Bordeaux. Vous avez choisi
d'illustrer la problématique des risques chez les personnels de
l’aide à domicile à partir de l’action d’une
collectivité. Expliquez-nous.
P.DOS - Il s’agit de la démarche proposée par un
centre intercommunal d’action sociale qui, en outre, n’a pas
concouru au Prix Santé au travail. Démarche somme toute
intéressante, car elle concerne une catégorie de travailleurs
particulièrement vulnérable et difficile à appréhender. Le métier
de l’aide à domicile s’exerce chez des particuliers rendant
l’encadrement malaisé. Il est physiquement pénible, exercé
ordinairement avec un matériel inadapté, et il est peu
valorisant. Par ailleurs, il concerne le plus souvent des femmes
seules qui ont pris cet emploi par nécessité : difficile
alors de parler de bien-être au travail.
Il nous semblait essentiel de mettre cette démarche en avant, car
elle nous a permis de prendre du recul sur la situation des
personnels : nous voulons partager cette expérience avec les
employeurs et les agents de la Fonction publique territoriale
présents à Préventica. L’action présentée illustre une manière
différente d’envisager les choses dans le métier de l’aide à
domicile : il est possible de réfléchir à certains
aménagements des logements, envisager des formations et des
actions de sensibilisation à l’encontre des agents et des
utilisateurs de services…