Quel est l’état des lieux concernant les addictions en
milieu professionnel ?
Tabac, alcool, cannabis, cocaïne… le Baromètre santé de l’Inpes
montre que la population active est concernée par l’usage de
substances psychoactives. Plus de 33% des personnes en situation
d’emploi déclarent fumer. Près de 20% d’entre eux consomment six
verres d’alcool et plus lors d’une même occasion, et ce au moins
une fois dans le mois. 7% consomment du cannabis. Or, 15% à 20%
des accidents professionnels, des absences et des conflits
interpersonnels au travail seraient imputables à une consommation
de produits psychoactifs.
Mais les risques liés à la consommation de substances
psychoactives en milieu professionnel dépassent les questions de
santé et de sécurité. Les conduites addictives génèrent des
dommages sociaux : relations conflictuelles, absentéisme,
inaptitudes, baisse de la qualité du travail…
L’insertion dans l’emploi, s’il protège statistiquement des
conduites addictives, peut aussi devenir une occasion de
consommer et même une incitation. Nombreux sont les fumeurs, les
consommateurs d’alcool et de cannabis qui déclarent avoir
augmenté leur consommation du fait de problèmes liés à leur
travail.
Avec plus de 22 millions de personnes salariées, secteurs privé
et public confondus, prévenir efficacement sur le lieu de travail
est donc une priorité.
Y a t-il des métiers ou populations particulièrement
concernées ?
Oui, certains secteurs professionnels
sont particulièrement exposés. Les salariés du BTP et de
l’hôtellerie/restauration présentent des consommations élevées,
toutes substances psychoactives confondues. Le secteur de
l’agriculture et de la pêche est marqué par une forte
consommation d’alcool. C’est parmi les professionnels des arts et
spectacles que l’on trouve le plus de consommateurs de cannabis
et de cocaïne.
A l’inverse, les salariés de l’administration publique, de
l’enseignement, de la santé et de l’action sociale, ainsi que
ceux des services des ménages déclarent des consommations moins
élevées.
La MILDECA envisage-t-elle des actions spécifiques
concernant la prévention des addictions en milieu professionnel
?
La prévention des addictions en milieu professionnel compte parmi
les priorités du plan gouvernemental de lutte contre les drogues
et les conduites addictives 2013-2017.
Nous souhaitons inciter les entreprises et les administrations à
développer des politiques collectives de prévention qui dépassent
l’approche traditionnelle des risques professionnels. La
prévention doit s’inscrire dans le cadre plus large de la
promotion de la santé et de la qualité de vie au travail. Pour
faciliter le déploiement de telles politiques de prévention, le
plan mise notamment sur la sensibilisation de
l’encadrement, des médecins du travail, des CHSCT à la
problématique des conduites addictives. Nous étudions également
de possibles évolutions du cadre légal et réglementaire.
Une connaissance accrue de l’impact des consommations de
drogues et d’alcool sur la vie au travail doit conforter la
mobilisation de l’ensemble des acteurs. C’est pourquoi nous
renforçons la recherche dans ce domaine. Nous souhaitons par
exemple quantifier les accidents graves ou mortels liés à ces
consommations.
Un effort de communication, enfin, s’avère nécessaire. Ces
données de recherche seront placées à la connaissance du public
avec l’appui des fédérations professionnelles, des ministères et
de l’assurance maladie.