Quels sont les principaux facteurs professionnels de
cancers identifiés à ce jour ?
Le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) examine
la cancérogénicité éventuelle de produits chimiques, de mélanges
complexes, d'expositions professionnelles, d’agents physiques et
biologiques et de facteurs comportementaux. Le terme d’agent est
utilisé pour désigner l’ensemble.
Le CIRC a défini 4 groupes de 1 à 4, de « l’agent est
cancérogène pour l’Homme » pour le groupe 1 (actuellement
113 agents), à « l’agent est probablement cancérogène pour
l’Homme »(groupe 2A), « l’agent est peut-être
cancérogène pour l’Homme » (groupe 2B), « l’agent est
inclassable quant à sa cancérogénicité pour
l’Homme » (groupe 3, 505 agents actuellement concernés)
et « probablement pas cancérogène pour l’Homme »
pour le 4. Dans le groupe 1, on retrouve bien évidemment
l'amiante qui est à l'origine de divers cancers : poumon, plèvre,
larynx, ovaire. Même si l'utilisation de l'amiante est interdite
depuis 1997, on estime que plus de 80 000 salariés en France
seraient encore exposés.
Les poussières de bois figurent également parmi les agents
cancérogènes avérés, l'exposition aux poussières de bois est à
l'origine de 45% des cancers de la cavité nasale et des sinus de
la face. D’autres expositions fréquentes concernent les huiles
minérales et la silice. Enfin les gaz d’échappement des moteurs
de diesel, pour lesquels il n’existe pas de tableau de maladie
professionnelle.
Le CIRC publie régulièrement des revues de l’ensemble des
connaissances établies (appelées monographies) sur la
cancérogénicité des agents examinés. Ce classement dans l’une des
catégories est provisoire, les monographies étant régulièrement
actualisées. Ces informations sont précieuses pour améliorer la
protection des salariés à ces cancérogènes potentiels. Un
exemple, le classement du perchloroéthylène (tétrachloroéthylène)
dans le groupe 2A confirmé en 2012 par le CIRC, et l’engagement
en France dès le 1er mars 2013, pour que l'installation de toute
nouvelle machine de nettoyage à sec fonctionnant au
perchloroéthylène soit interdite dans des locaux contigus à
des locaux occupés par des tiers ; les machines existantes
fonctionnant au perchloroéthylène dans ces mêmes locaux contigus
seront interdites de manière progressive, en fonction de leur âge
(arrêté du 6 décembre 2012).
Comment repérer une origine professionnelle en cas de
cancer ?
C'est une démarche d’investigation complexe. Le cancer peut se
déclarer plusieurs dizaines d'années après l'exposition et il va
donc falloir retracer l'histoire professionnelle du patient pour
établir le lien entre travail et cancer.
C'est toute la finalité de la consultation "cancers
professionnels" que nous avons ouverte au Centre Léon Bérard en
partenariat avec les Hospices Civils de Lyon. La consultation est
assurée par deux médecins, le Dr Barbara Charbotel (médecin de
santé au travail) et le Dr Béatrice Fervers (cancérologue) afin
de rechercher d’éventuelles expositions professionnelles chez les
patients et d'identifier si le cancer est d'origine
professionnelle. Le cas échéant, ce dispositif permet une prise
en charge et un accompagnement du patient et ses proches dans une
démarche de reconnaissance du cancer en maladie
professionnelle.
Mieux identifier les cancers d’origine professionnelle, c’est
mieux les prévenir à l’avenir.
Plus largement, notre objectif est d'améliorer la connaissance et
la reconnaissance des cancers professionnels, notamment avec le
site d'informations des publics sur les liens avérés ou suspectés
de cancer en lien avec l’environnement, que nous animons au
Centre Léon Bérard en partenariat avec le CIRC, le cancéropôle
Lyon Auvergne Rhône-Alpes et le soutien de la Région
Rhône-Alpes : cancer-environnement.fr. Le Centre Léon Bérard
est aussi très investi dans la recherche, avec plusieurs projets
d’envergure nationale et internationale sur l’origine
professionnelle des cancers du poumon, les liens entre
l'exposition aux pesticides et risques de cancer du testicule, et
les liens entre exposition aux dioxines et cancer du sein
notamment.
Quels moyens de prévention des cancers professionnels
préconiser ?
Tout d'abord l'information et la sensibilisation, autant auprès
des employeurs que des salariés. Les effets de l'exposition ne
sont pas visibles immédiatement et le salarié n'a donc pas
forcément conscience des dangers auxquels il s'expose. Le rôle du
médecin du travail est donc essentiel pour repérer les situations
potentiellement exposantes et accompagner l'employeur dans sa
politique de prévention : substitution des substances
cancérogènes, protections individuelles et collectives,
limitation des expositions, mise en œuvre de recommandations
nutritionnelles…
Et lorsqu'un salarié est potentiellement exposé, la surveillance
médicale devra être renforcée.
Le Président de la République a lui-même fait de la prévention
des cancers d'origine professionnelle une priorité du Plan Cancer
2014-2019. Nous devons tous nous mobiliser !
En savoir plus
- Comprendre informer prévenir : Portail d’information des publics Cancer Environnement