Le Pôle d’excellence cyber, initié en février 2014 par le
  ministère de la Défense et par le Conseil régional de Bretagne,
  est implanté en Bretagne. Pourquoi la Bretagne, plus
  particulièrement ?
  Factuellement, tout simplement parce que la « plaque cyber »,
  comme nous l’appelons, du ministère de la Défense s’y trouve ! En
  premier lieu, bien sûr DGA Maîtrise de l’information qui est
  implanté depuis près de 50 ans à Bruz, près de Rennes (cet
  établissement de la Direction générale de l’armement est l’expert
  technique du ministère pour les systèmes d’information et de
  communication, la cybersécurité, la guerre électronique et les
  systèmes de missiles tactiques et stratégiques) mais aussi le
  CALID Bretagne (Centre d’analyse et de lutte informatique
  défensive), l’École des transmissions (ETRS), l’École navale, les
  écoles de Saint-Cyr Coëtquidan, l’Ensta Bretagne, la 787e
  compagnie de guerre électronique et désormais le commandement des
  systèmes d’information et de communication (COMSIC), implanté sur
  le site de l’ETRS, ainsi que la 807e compagnie de combat de
  cybersécurité.
  Si on prend l’exemple de DGA Maîtrise de l’information, cela fait
  plus de 25 ans que ses experts font de la sécurité des systèmes
  d’information (SSI), qui est l’ancêtre de la cyber en quelque
  sorte, et la décision de forte montée en puissance de
  l’établissement dans le domaine de la cyberdéfense en tant que
  telle remonte à 2010.
  Ces entités du ministère de la Défense s’appuient sur le tissu
  académique et industriel régional, qui est particulièrement dense
  en matière de cybersécurité, de numérique et de
  télécommunications : là aussi, c’est de longue date un point fort
  du territoire. La Bretagne se classe 2e région dans le numérique,
  derrière l’Ile-de-France.
  Il était donc naturel que le ministère de la Défense, au titre du
  pacte défense cyber, et le Conseil régional, au titre du pacte
  d’avenir pour la Bretagne, conjuguent leurs forces au sein du
  Pôle d’excellence cyber pour stimuler le développement de la
  formation, de la recherche et de la filière industrielle, au
  profit du ministère de la Défense et plus largement de la
  communauté nationale cyber.
  
  Ce pôle ayant pour vocation à avoir une portée nationale et un
  objectif de rayonnement international, comment peut-il alors se
  concentrer autour d’acteurs basés principalement en Bretagne
  ?
  Il est inexact de dire cela. Si pour les raisons objectives
  évoquées ci-dessus (en particulier la présence de la plaque cyber
  du ministère de la Défense et la forte concentration de
  l’écosystème numérique) et si, pour une question de temps, de
  priorité ou de solidité de notre structuration, nous avons
  d’abord privilégié la constitution du « collectif régional »
  (mais ça, c’était en 2014 ! De l’eau a coulé sous les ponts
  depuis…), le Pôle d’excellence cyber a bien une vocation
  nationale et s’inscrit dans des dynamiques qui vont bien au-delà
  des frontières de notre pays, à l’échelle de l’Europe, de l’OTAN
  et aussi de pays tels que le Japon ou les États-Unis avec
  lesquels des partenariats sont d’ores et déjà engagés.
  Plus proche de nous, dès janvier 2015, 13 grands groupes
  industriels nationaux – tels que Airbus D&S, Thales, DCNS,
  Nokia, La Poste, Orange, EDF… – ont signé un partenariat avec
  le
  Pôle d’excellence cyber sur ses trois dimensions (formation,
  recherche, développement industriel), indépendamment de leur
  implantation, ou non, en Bretagne.
  Donc oui, je réaffirme bien le caractère national du Pôle
  d’excellence cyber et ses ambitions de rayonnement international,
  preuves à l’appui ! Cela dit, votre question est courante, mais
  attention à ne pas avoir seulement une vision « jacobine » : tout
  ne se passe pas forcément à Paris !
  
  Au sein du Conseil d’administration du Pôle d’excellence cyber,
  dont la forme juridique est une « association loi 1901 » nous
  retrouvons des membres issus tant du secteur public que privé,
  des civils comme des militaires. Cela engendre-t-il parfois des
  tensions ou bien est-ce, selon vous, une vraie force, entrainant
  un réel dynamisme et bénéficiant d’un savoir-faire hors du commun
  ?
  Effectivement, il n’est pas si habituel de réunir au quotidien
  dans une même salle des uniformes, des costumes et des t-shirts !
  Mais c’est incontestablement une force : faire travailler
  ensemble le domaine militaire et le domaine civil, le public et
  le privé, le monde universitaire et le monde des affaires, permet
  à tous les acteurs d’avoir une bonne compréhension des besoins
  des uns, des attentes des autres et des contraintes de tous.
  Alors, certes, c’est en quelque sorte du management «
  interculturel » mais nous démontrons chaque jour largement que
  cette approche décloisonnée et pragmatique, cette écoute et cette
  compréhension mutuelles sont des facteurs considérables de
  succès.
  L’ensemble des partenaires du Pôle d’excellence cyber ont par
  ailleurs la certitude d’oeuvrer, au sein du Pôle d’excellence
  cyber, pour l’intérêt général : cela transcende aussi bien des
  difficultés ! Bien sûr, ils savent, nous savons, que la
  disponibilité de personnels qualifiés, de produits et de services
  de confiance ou encore le développement des entreprises serviront
  aussi l’intérêt particulier de chaque partenaire : il s’agit d’un
  investissement gagnant-gagnant pour tous.
  
  Le Pôle d’excellence cyber se structure principalement sur trois
  dimensions que sont la formation, la recherche et le
  développement industriel. Parmi ces trois dimensions, y a-t-il
  une action prioritaire, aujourd’hui, à mener ?
  Ces trois dimensions sont indissociables. Elles fonctionnent
  ensemble et avancent ensemble.
  Je reconnais néanmoins que notre priorité initiale concernait, et
  concerne encore, les ressources humaines : sans personnel
  qualifié, point de salut ! Et on sait que le secteur de la
  cybersécurité se révèle particulièrement tendu de ce point de
  vue, aussi bien en formation initiale qu’en formation continue,
  celle-ci étant particulièrement cruciale dans le domaine cyber
  compte tenu de la vitesse d’évolution des menaces.
  D’où les multiples actions que nous avons menées dans ce domaine,
  toujours en dialogue permanent entre les opérateurs de formation
  et la filière industrielle : ces actions couvrent aussi bien de
  nouvelles formations supérieures de haut niveau que des modules
  de sensibilisation pour des filières techniques au lycée, des
  chaires industrielles et de recherche que des formations
  continues, y compris sous la forme de MOOC ou de SPOC, les
  sciences de l’ingénieur que les sciences humaines et sociales,
  ainsi que les challenges pour rendre attractive la filière et
  aider au recrutement à l’instar que ce que font, main dans la
  main, Thales et Airbus DS dans le cadre de l’European cyber
  week.
  Dans le périmètre de nos partenaires académiques, cela s’est déjà
  traduit par une augmentation de 40%, d’une année scolaire à
  l’autre, du nombre d’étudiants formés ou fortement sensibilisés à
  la cybersécurité !