Quand et comment est née la Chaire Paix économique,
Mindfulness et Bien-être au travail ?
Elle est née d’une rencontre en 2009 avec Antoine Raymond,
dirigeant de l’entreprise A.Raymond. À l’époque, nous sortions
d’une période très dure avec la crise financière et la vague de
suicides d’une grande entreprise fortement médiatisée. Antoine
Raymond m’interpelle sur le contexte de guerre économique qui
allait nous conduire droit dans le mur. Ne prouvait-on pas
imaginer un lieu où des dirigeants et des chercheurs pouvaient
travailler ensemble et poser les bases d’une autre façon de faire
de l’économie : ce qui deviendra la paix économique.
La chaire a donc démarré fin 2012 avec le soutien de 5
entreprises : ARaymond, Böllhoff Otalu, Udimec (UIMM Isère), MMA
et HP. Ces entreprises étaient engagées sur 3 ans, on est à la 8e
année et sur ces 5 fondateurs, 4 sont toujours avec nous.
Comment pouvez-vous définir la paix économique sur
laquelle est axée votre Chaire ?
La paix économique constitue l’alternative à un mode de
fonctionnement des affaires basé sur l’hypercompétition, qui
produit certes des richesses financières, mais se traduit par une
dégradation des personnes (stress, burnout, suicide), par un
individualisme exacerbé (injonction de réussite individuelle) et
par le délitement du lien social, par la destruction d’outils de
production, par le déplacement de familles entières (plan de
restructuration et fermeture d’usines).
Elle instaure entre ses membres des relations de confiance envers
l’ensemble de parties prenantes y compris ses concurrents
directs. Dans une orientation constructive et coopérative, elle
permet à l’entreprise de créer de la richesse au profit du bien
commun.
La paix économique n’est pas un but à atteindre, mais un
engagement quotidien à agir, du mieux possible pour le bien
commun.
Très concrètement, quels sont les axes de travail de
votre Chaire ?
Nous travaillons sur des dispositifs de Recherche-Action avec
trois grands axes qui correspondent aux trois grandes dimensions
d’une activité économique. Le premier est la dimension de
l’intime, de la personne. Le deuxième est le bien-être au
travail. Le troisième est l’épanouissement de l’ensemble des
parties prenantes. Comment une entreprise peut-elle se penser
pour améliorer l’épanouissement de ses parties prenantes internes
et externes. Avec les dirigeants qui nous soutiennent, nous
affirmons que le but d’une entreprise est de s’inscrire dans la
cité, de renforcer le tissu social et de contribuer au bien
commun.
Ce mode de réflexion se déploie via la Recherche, l’action en
entreprise et le Monde de l’Education.
Par exemple, en recherche, nous avons engagé plusieurs projets,
notamment sur la méditation pleine conscience et les pratiques
managériales, ou sur la culture achats : comment peut-on passer
d’un acheteur cost-killer à un acheteur pacifié ? Comment grandir
en faisant grandir ses fournisseurs ?
Dans le monde de l’entreprise, nous avons mis en place une
communauté de pratiques dans laquelle sont présents des chargés
de projet paix économique de chaque entreprise partenaire. Nous
nous retrouvons tout au long de l’année pour partager et
coconstruire.
Enfin, pour ce qui est de l’enseignement, notre objectif est de
former les futurs managers pour qu’ils soient capables de gérer
l’économie autrement. La paix économique est un des axes
stratégiques de l’EM Grenoble et s’insère de dans la
formation initiale des étudiants. Nous avons récemment cocréé un
certificat avec la Fabrique Spinoza pour former les managers à
gérer ces changements.
En cette période particulière, quelles initiatives
avez-vous prises pour partager ces idées particulièrement
d’actualité ?
En quelques jours, le coronavirus a bouleversé les habitudes à
travers le monde et amené les Français au confinement. Dans cette
période troublée, bien entendu, nous poursuivons nos travaux de
recherche, mais nous proposons aussi deux rendez-vous
hebdomadaires en ligne pour donner des clés de réflexion et
permettre un retour à soi : un podcast « L’Instant méditation »
et une vidéo « Les Moments Paix économiques »
Proposer un autre regard sur l'actualité, nourrir et donner des
clés de réflexion ou faire face aux idées reçues, tel est
l'objectif de cette série de vidéos « Les Moments Paix
économiques ».
Chaque mardi, et pendant le temps du confinement, un des
chercheurs de la Chaire Paix économique, Mindfulness et Bien-être
au Travail apporte son regard sur cette période selon les trois
dimensions de la Paix économique : personnelle, économique et
sociétale. Par exemple : Pourquoi utilise-t-on un langage de
guerre ? Est-ce que le confinement peut rapprocher au lieu
d'éloigner ?…
Avec le podcast « L’Instant méditation » chaque jeudi, et pendant
le temps du confinement au moins, un des membres de la Chaire
Paix économique, Mindfulness et Bien-être au travail guide un
moment de méditation.
La pratique de la méditation, quelle que soit la situation vécue,
peut en effet être un soutien pour revenir à soi et trouver un
ancrage avant de retourner au contact de ses relations
extérieures.
La paix économique doit être plus que jamais un engagement quotidien à agir pour le bien commun.
Le contexte actuel nous invite à repenser fondamentalement ce que nous souhaitons faire de notre société. Une ligne d’action intimement inscrite dans l’ADN de la Chaire Paix économique, Mindfulness et Bien-être au travail.

Dominique STEILER
Directeur associé, titulaire de la Chaire Paix économique
Mindfulness Et Bien-Être Au Travail, Em Grenoble
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- 20/04/2020