Le texte de la Commission Européenne propose d'adopter des valeurs limites d'exposition professionnelles (VLEP) contraignantes pour 13 substances, l'ancienne directive n'en prévoyant que pour trois.
L'Institut Syndical Européen, l'ETUI (European Trade Union Institute), se félicite que la Commission européenne se décide enfin à renforcer sa législation contre les cancérogènes sur les lieux de travail. Il juge cependant que la proposition ne va pas assez loin.
" Le point positif est que le processus législatif est
maintenant ouvert et qu’il sera possible d’amender cette
proposition initiale. Son contenu reste minimaliste. Aucun
article de la directive n’a été amélioré. Seule l’annexe 3 sur
les VLEP a été substantiellement modifiée. Elle ne concerne
cependant que 13 cancérogènes, ce qui est bien trop modeste par
rapport aux demandes de la présidence néerlandaise ", juge
Laurent Vogel, chercheur à l'ETUI.
Le gouvernement des Pays-Bas, qui exerce la présidence de l’Union
européenne pour le premier semestre 2016, réclame l’introduction
de 50 VLEP. Pour sa part, la Confédération européenne des
syndicats a établi une liste de 71 substances ou procédés pour
lesquels elle juge nécessaire d'établir des VLEP.
La Commission a annoncé que 12 autres VLEP feraient l’objet d’une
proposition législative avant la fin de l’année 2016. Elle ne
s’est pas engagée en ce qui concerne d’autres initiatives
ultérieures.
En termes de contenu, les VLEP proposées pour un certain nombre
de substances sont beaucoup plus élevées que celles adoptées dans
plusieurs États membres. L’exemple le plus caractéristique
concerne la silice cristalline, une substance qui provoque des
maladies et cancers du système respiratoire. La Commission
propose une VLEP de 100 microgrammes par mètre cube alors que le
Danemark, la Finlande, l’Espagne imposent une VLEP de 50
microgrammes, de même que les États-Unis. La valeur limite
européenne ne permettra pas d'assurer une protection suffisante
des 5 millions de travailleurs qui y sont exposés dans l’Union
européenne.
La balle est désormais dans le camp du Parlement européen et du Conseil des ministres. Ceux-ci peuvent amender la proposition de la Commission de manière à renforcer la protection des travailleurs contre le risque de cancer. Ils peuvent notamment étendre le champ d’application de la directive aux toxiques pour la reproduction qui constituent un risque important dans le monde du travail absent de la proposition formulée par la Commission.
La révision de la directive sur l'exposition des travailleurs à
des agents cancérigènes et mutagènes, annoncée dès 2002, a
longtemps été paralysée par la Commission elle-même.
Les critiques convergentes du Parlement européen, de nombreux
États Membres, des acteurs de la santé publique et des
organisations syndicales ont permis de remettre en cause cette
paralysie. Rappelons que plus de 100.000 personnes meurent chaque
année à la suite d’un cancer causé par le travail.