Cette question semble aller de soi pour des experts du sujet et pourtant, je constate régulièrement combien la réalité du terrain est toute autre. Je souhaite donc reformuler la différence fondamentale qui existe entre la notion de qualité de vie et des conditions du travail (QVCT) et celle de qualité de vie au travail (QVT) en m’appuyant sur la logique de RSE et de DD.
Les politiques de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) et de Développement Durable (DD) cherchent à avoir un impact positif sur les employés tout en respectant les enjeux environnementaux et sociaux. Ainsi elles définissent la QVCT comme un élément central pour garantir le bien-être des employés tout en respectant les principes de durabilité.
Dans cette logique de RSE et DD, la QVCT traite de plusieurs aspects, notamment :
Les conditions de travail optimisées : Cela inclut la sécurité, l'ergonomie et la prévention des risques psychosociaux.
L’équilibre vie professionnelle/vie personnelle : qui doit être recherché notamment au travers des pratiques de télétravail ou favorisant des horaires flexibles.
L’engagement et la reconnaissance : La QVCT met l'accent sur la valorisation des employés, leur autonomie et leur implication dans les décisions.
L’environnement de travail sain : Cela inclut des initiatives pour réduire le stress et promouvoir la santé physique et mentale.
Toutes ces pratiques de QVCT portées par une logique de RSE et DD interrogent donc fondamentalement les pratiques de management et de leadership des organisations ; le nier serait dangereux.
Or la plupart du temps, les organisations publiques ou privées préfèrent encore mettre l’accent sur des mesures de développement personnel et physique : des applications informatiques pour mieux gérer stress et sommeil ou des séances de sophrologie ou de méditation sont donc mises en place. Des pratiques de massage ou d’étirement voire des conseils nutritionnels ou de meilleure gestion de sa vie personnelle ou familiale peuvent aussi être prodigués. Cette approche hygiéniste et disons-le à portée cosmétique (même si les sommes engagées ne le sont pas) relèvent de la QVT et non de la QVCT et sont une façon de faire porter sur l’individu bénéficiaire de ces mesures la responsabilité de la réussite ou de l’échec de son propre bien-être. C’est aussi une manière d’évacuer les vrais problèmes que pose le travail pour que les conditions d’organisation et d’exécution d’un travail de qualité puissent exister, ce que traitent la QVCT et la prévention primaire.
Or permettre à chacun de bénéficier des moyens et des ressources adéquates pour bien faire son travail et de s’exprimer sur ce qui ne va pas / plus ou sur les pistes d‘amélioration des modalités du travail au niveau individuel ou collectif - contribuant ainsi positivement au développement de l’identité professionnelle de chacun - n’est pas qu’un sujet de QVCT : c’est le fondement même des pratiques de management et de leadership.
Pourtant de nombreuses organisations préfèrent se limiter à la prise en charge physique voire spirituelle du salarié pour ne pas avoir à traiter des impacts du travail sur sa santé mentale et inversement : comment alors envisager la durabilité de ces pratiques pour le bien-être de chacun, des collectifs et de l’organisation elle-même ? Ne serait-il pas judicieux de répondre à cette question essentielle l’année où la santé mentale est une cause nationale ?