Thomas Marcon - Ineris : « Il y a une augmentation notable des accidents technologiques engendrés par un événement naturel »

« Il y a une augmentation notable des accidents technologiques engendrés par un événement naturel »

SECURITE DES LIEUX DE TRAVAIL || Gestion de crise / PCA
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28/06/2021
Thomas Marcon - Ineris
Thomas Marcon
ingénieur à l’unité spécialisée en étude de risques à l’Institut national de l’environnement industriel et des risques
Ineris

On les appelle les NaTech. Ces accidents technologiques causés par des événements naturels sont de plus en plus fréquents. Il est donc devenu indispensable pour les entreprises de mieux appréhender ce type de risques. Nous avons voulu en savoir plus auprès de Thomas Marcon, ingénieur à l’Ineris.

Qu’est-ce que le risque NaTech ?
Les accidents NaTech sont des accidents technologiques, comme la dispersion atmosphérique de toxiques, les incendies, explosions, pollutions, etc, induits par les aléas naturels. En France, il s’agit principalement des fortes pluies et inondations, des températures extrêmes et de la foudre. Ces aléas naturels peuvent être à l’origine ou aggraver des scénarios accidentels liés aux installations industrielles.

Pourquoi en parle-t-on de plus en plus ?
Nous en parlons de plus en plus, parce qu’il y a une augmentation notable de cette typologie d’accident. Certains de ces accidents NaTech sont exacerbés suite au changement climatique. En France par exemple, en 2019, plus de la moitié des accidents NaTech ont été provoqué par de fortes chaleurs.

De manière globale, les NaTech ne représentent pas un important pourcentage des accidents majeurs. Si vous consultez la base Aria – qui recense les accidents en France et à l’étranger – les NaTech n’en représentent que 2%. En France sur l’année 2019, par contre, ils représentent 9% des accidents industriels recensés dans cette base.

Quelles sont les conséquences des NaTech pour les industriels ?
Les conséquences dépendent du type d’aléas : inondation, séisme, foudre…Les inondations et les séismes peuvent avoir un impact direct sur les installations (renversement, soulèvement, flambement, rupture…) à l’origine de perte de confinement de substances potentiellement dangereuses.
Ils peuvent également avoir un impact indirect en générant par exemple des pertes d’utilités (électricité, air d’instrumentation, eau…) qui alimentent les barrières de sécurité nécessaires à la sécurisation ou mise en repli des installations. La foudre peut elle-aussi aussi avoir des impacts sur les installations électriques, mais aussi potentiellement générer des incendies.
Une autre conséquence est liée à l’accessibilité du site, des installations. Les aléas naturels sont des phénomènes qui impactent une zone entière et pas seulement un site industriel. Un accident NaTech peut entraver l’accès au site ou aux installations, et perturber notamment la mise en œuvre d’actions manuelles de sécurité (mise en sécurité des installations, fermeture de vannes, déploiement de moyens d’extinction…)
Il faut aussi noter que lors de ces événements, la priorité des secours est de porter assistance à la population. Les industriels doivent donc pouvoir faire preuve d’autonomie dans la gestion de ce type d’événements.

Comment se protéger de ces risques ?
La réglementation des installations classées impose aux exploitants d’installations soumises à autorisation la réalisation d’une étude de dangers qui repose sur une analyse de risques. Les risques intrinsèques aux installations mais aussi les potentiels agresseurs externes (y compris naturels) doivent être pris en compte dans le cadre de cette étude. Un traitement particulier de ces risques par l’intermédiaire d’études spécifiques peut notamment être exigé (analyse de risques foudre, étude séisme).
L’évaluation de ce type de risques peut conduire notamment à la mise en place de mesures adaptées de protection ou de renforcement des installations mais aussi à la mise en place de procédures organisationnelles de mise en sécurité dédiées, le cas échéant, en fonction de la cinétique de l’aléa.
En fonction du type d’inondation par exemple auquel le site peut être soumis, la cinétique de l’aléa (rapide ou lente) orientera les stratégies de protection et de sécurisation du site, entre mise en place de dispositifs de sécurité pérennes (ancrage ou amarrage par exemple) et mise en œuvre d’actions de sécurité (transfert de produits, déplacements ou surélévations des contenants, par exemple) définies dans le cadre de procédures organisationnelles dédiées (par déclenchement d’alerte associée).

Quel est le rôle de l’Ineris dans tout cela ?
L’ineris est un établissement public à caractère industriel et commercial. En appui des pouvoirs publics, il apporte au ministère de la Transition écologique son expertise technique notamment sur ce type de risques, au travers de programme d’appui mais aussi de formations auprès des inspecteurs de l’environnement en région.

Son statut particulier lui permet aussi de réaliser des prestations d’assistance technique et des formations pour le compte d’exploitants. D’autre part, les projets de recherche au niveau national et international qu’il mène, contribuent à développer son expertise et sa compétence technique.