Guillaume Farde - Sciences Po Paris : Les centres commerciaux sont des cibles à haute valeur ajoutée symbolique pour le terrorisme

Les centres commerciaux sont des cibles à haute valeur ajoutée symbolique pour le terrorisme

SECURITE DES LIEUX DE TRAVAIL || Contrôle d'accès
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13/03/2017
Guillaume Farde - Sciences Po Paris
Guillaume Farde
Maître de conférences, Conseiller scientifique de la filière sécurité-défense de l’Ecole d’Affaires publiques
Sciences Po Paris

Expert en sûreté, Guillaume Farde a constaté et analysé l’impact du risque terroriste sur les centres commerciaux en France. Pour faire face à cette nouvelle menace, les « temples de la consommation » doivent entièrement repenser l’organisation de leur politique de sécurité.
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En quoi les centres commerciaux sont-ils particulièrement concernés par la menace terroriste ?
Les centres commerciaux sont ce qu’on appelle des « cibles molles », c’est à dire une cible civile sans défense dont le niveau de protection ne permet pas de résister à une attaque terroriste. Pourtant, une attaque sur un centre commercial a une forte valeur symbolique car elle toucherait au mode de vie occidental, à une expression forte du capitalisme et aurait pour effet de fragiliser durablement les habitudes de consommation de toute une population et de l’économie en général.
L’attaque terroriste de Nairobi en 2013 avait ainsi pour cible un centre commercial de luxe. Et l’on a su après les attentats de Paris de novembre 2015 que la cellule terroriste dirigée par Abdelhamid Abaaoud avait pour intention de commettre ensuite un attentat sur le Centre Commercial des 4 temps à La Défense.

Au lendemain des attentats de Paris, comment les centres commerciaux ont-ils réorganisé leur sécurité ?
Il faut d’abord souligner que la sécurité est aujourd’hui un enjeu économique extrêmement fort pour les centres commerciaux. Après la divulgation par la presse du projet d’attentat sur Les 4 Temps, la fréquentation de ce centre commercial a chuté de façon drastique. Si un attentat se produisait dans un centre commercial, les conséquences pourraient être dramatiques, bien évidemment en termes de pertes humaines, s’il y en avait, et au delà en termes de préjudice économique, de remise en état éventuelle et de préjudice d’image.
Après les attentats de Paris, les centres commerciaux ont immédiatement renforcé les effectifs dédiés à la surveillance humaine, entraînant un choc de demande sur le marché de la sécurité.
Mais les agents de sécurité, qu’ils soient expérimentés ou nouvellement recrutés, ne sont pas formés pour apporter une réponse appropriée aux missions qui leur sont confiées en matière de risque terroriste. Comment un agent qui a jusque là a eu pour mission de lutter contre les vols, peut-il du jour au lendemain se transformer en profiler apte à détecter un éventuel terroriste ? Et surtout en cas d’acte terroriste, comment peut-il, sans aucune formation appropriée, être capable de gérer une situation de crise ?

Comment devraient évoluer les politiques de sécurité dans les centres commerciaux ?
Le terrorisme va faire partie de nos vies pendant encore de longues années. Il ne faut pas être fataliste mais résilient. Les centres commerciaux vont devoir bâtir leur politique de sécurité sur deux dimensions. D’abord la dissuasion pour empêcher une attaque, en travaillant sur la surveillance humaine, le contrôle d’accès et les aménagements architecturaux et urbains. Deuxième dimension toute aussi importante : que faire en cas d’attaque terroriste ? Pour que les pertes humaines soient le plus faible possible, les personnels de sécurité des centres commerciaux devront savoir gérer une crise, mettre en place les évacuations et confinements et interagir avec les forces de l’ordre.
Cette problématique doit être prise à bras-le-corps par tous les responsables de centres commerciaux dès aujourd’hui.

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