Danièle Jourdain Menninger - MILDECA : Les conduites addictives génèrent des dommages sociaux

Les conduites addictives génèrent des dommages sociaux

|| Santé au travail
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25/06/2014
Danièle Jourdain Menninger - MILDECA
Danièle Jourdain Menninger
Présidente de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives
MILDECA
Créée en 1982, la mission permanente de lutte contre la toxicomanie, devenue la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), coordonne la politique publique de lutte contre les drogues et les conduites addictives. Ses attributions couvrent également le domaine professionnel. Présentation.

Quel est l’état des lieux concernant les addictions en milieu professionnel ?
Tabac, alcool, cannabis, cocaïne… le Baromètre santé de l’Inpes montre que la population active est concernée par l’usage de substances psychoactives. Plus de 33% des personnes en situation d’emploi déclarent fumer. Près de 20% d’entre eux consomment six verres d’alcool et plus lors d’une même occasion, et ce au moins une fois dans le mois. 7% consomment du cannabis. Or, 15% à 20% des accidents professionnels, des absences et des conflits interpersonnels au travail seraient imputables à une consommation de produits psychoactifs.
Mais les risques liés à la consommation de substances psychoactives en milieu professionnel dépassent les questions de santé et de sécurité. Les conduites addictives génèrent des dommages sociaux : relations conflictuelles, absentéisme, inaptitudes, baisse de la qualité du travail…
L’insertion dans l’emploi, s’il protège statistiquement des conduites addictives, peut aussi devenir une occasion de consommer et même une incitation. Nombreux sont les fumeurs, les consommateurs d’alcool et de cannabis qui déclarent avoir augmenté leur consommation du fait de problèmes liés à leur travail.
Avec plus de 22 millions de personnes salariées, secteurs privé et public confondus, prévenir efficacement sur le lieu de travail est donc une priorité.

Y a t-il des métiers ou populations particulièrement concernées ?
Oui, certains secteurs professionnels sont particulièrement exposés. Les salariés du BTP et de l’hôtellerie/restauration présentent des consommations élevées, toutes substances psychoactives confondues. Le secteur de l’agriculture et de la pêche est marqué par une forte consommation d’alcool. C’est parmi les professionnels des arts et spectacles que l’on trouve le plus de consommateurs de cannabis et de cocaïne.
A l’inverse, les salariés de l’administration publique, de l’enseignement, de la santé et de l’action sociale, ainsi que ceux des services des ménages déclarent des consommations moins élevées.

La MILDECA envisage-t-elle des actions spécifiques concernant la prévention des addictions en milieu professionnel ?
La prévention des addictions en milieu professionnel compte parmi les priorités du plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017.
Nous souhaitons inciter les entreprises et les administrations à développer des politiques collectives de prévention qui dépassent l’approche traditionnelle des risques professionnels. La prévention doit s’inscrire dans le cadre plus large de la promotion de la santé et de la qualité de vie au travail. Pour faciliter le déploiement de telles politiques de prévention, le plan mise notamment sur la sensibilisation de  l’encadrement, des médecins du travail, des CHSCT à la problématique des conduites addictives. Nous étudions également de possibles évolutions du cadre légal et réglementaire.
Une connaissance accrue  de l’impact des consommations de drogues et d’alcool sur la vie au travail doit conforter la mobilisation de l’ensemble des acteurs. C’est pourquoi nous renforçons la recherche dans ce domaine. Nous souhaitons par exemple quantifier les accidents graves ou mortels liés à ces consommations.
Un effort de communication, enfin, s’avère nécessaire. Ces données de recherche seront placées à la connaissance du public avec l’appui des fédérations professionnelles, des ministères et de l’assurance maladie.