À l’occasion de la Journée mondiale de la sécurité et de la santé
au travail, Tariq Essaid, président du CONAMET, juriste et expert
en management des risques professionnels, revient pour Préventica
sur la prise en compte des risques professionnels et la manière
dont cette journée est vécue au Maroc.
Préventica - Le 28 avril a lieu la Journée mondiale de la
sécurité et de la santé au travail. De quelle manière cet
événement est-il perçu au Maroc ?
Tariq Essaid - La sécurité et la santé au
travail (SST) est inscrite de longue date dans la législation
marocaine : Dahir des Obligations et contrats de 1913
obligeant les employeurs à prendre en compte la sécurité de leurs
salariés, première législation du travail en 1926, droit des
victimes d’accident du travail à réparation en 1927 étendu aux
maladies professionnelles en 1943, législation conférant aux
médecins du travail la pleine charge de la SST en 1957 (inscrite
dans le Code du travail en 2003).
Dans les textes, le pays est très concerné par cette
problématique. On observe également que la culture du risque est
de plus en plus présente dans les entreprises même si, dans la
pratique, il y a encore beaucoup à faire. À ce sujet, le conseil
de gouvernement marocain a approuvé en mars dernier le projet de
loi n° 16-12 portant approbation de la convention nº 187 sur le
cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail de
l’OIT (Organisation Internationale du Travail).
La Journée mondiale, quant à elle, n’est célébrée que depuis
quelques années (trois ou quatre ans au plus). Les représentants
des salariés n’organisent pas particulièrement d’événement dans
ce sens – la date est trop proche du 1er mai, fête du Travail,
pour laquelle les initiatives sont nombreuses et demandent
beaucoup d’énergie – toutefois, leur cahier revendicatif fait
ressortir la SST au même niveau que les revendications
salariales. Petit à petit, on voit tout de même apparaître des
initiatives spécifiques à l’occasion du 28 avril : actions
dans les entreprises, journées spéciales sur certaines radios...
En 2012, le Forum national de la santé et sécurité au travail
s’est également placé dans la perspective de cette journée.
Prév. - De quelle manière le CONAMET se positionne-t-il
par rapport à celle-ci ?
T.E. - Nous privilégions l’approche collégiale à
l’initiative personnelle : cela va dans le sens des actions
que nous souhaitons mener. Partenaires du Forum national de la
santé et sécurité au travail, le 26 avril, c’est donc avec les
autres acteurs que nous avons choisi de nous investir pour cette
journée mondiale 2012. L’aspect collaboratif nous semble le plus
important pour faire avancer les choses. Nous sommes
particulièrement investis dans ce genre de manifestations tel que
le second évènement de la même journée, le Forum des étudiants de
l’école Hassania où nous avons animé une table ronde et un
atelier sur le thème des risques professionnels.
Mais, au-delà des Forums, le CONAMET, riche de son expertise en
conformité sociale, œuvre toute l’année pour développer la
prévention des risques professionnels, accroitre la santé et la
sécurité sur les lieux de travail.
Prév. - La Journée mondiale 2012 est placée sous le thème
de l’économie verte. Que signifie cette problématique pour le
Maroc ?
T.E. - Le Maroc possède de nombreux atouts et
richesses naturelles lui permettant d’envisager sérieusement le
développement des nouvelles technologies. Mais, alors que le pays
a pris conscience de l’importance de mobiliser ses énergies pour
développer une économie verte, le dispositif réglementaire
marocain est encore incomplet et non effectif en matière
d'évaluation des dangers.
Néanmoins, la situation progresse : une charte de
l’environnement, basée sur le principe de l’adhésion volontaire,
a été rédigée. Elle a suscité un grand intérêt au moment de sa
rédaction. On constate que le pays a la volonté de s’ouvrir à la
« révolution verte » et de faire les choses
conformément aux volontés internationales. Des ajustements
s’imposent pour y arriver : notre collège a mis la
problématique des risques de l’économie verte au premier plan des
discussions il y a quelque temps déjà. En effet, nous avons fait
prendre conscience que ce que l’on a conçu pour ne pas dégrader
l’environnement ne doit pas dégrader la santé des hommes.
Expert national ISO 26000, je suis particulièrement sensibilisé à
la responsabilité sociétale des organisations, excellent levier
du développement durable, incluant gouvernance, droits de
l’Homme, relations et conditions de travail, environnement,
loyauté des pratiques, questions relatives aux consommateurs,
communautés et développement local : seule manière de
concilier progrès économique et sociétal en préservant les
équilibres de la planète. C’est le message que je fais passer dès
que j’en ai l’occasion.
Le CONAMET (Collège National des Médecins du
Travail) est une association de droit marocain créé en
1999.
Son bureau composé de 17 membres regroupe les présidents des
associations régionales des médecins du travail (8 membres).
Cette présence des présidents dans l’instance dirigeante du
CONAMET, l’organisation de la journée du collège par ces
associations (à la charge du CONAMET) ainsi que sa coprésidence
des journées propres aux dites associations, confirme sa
vocation fédératrice de l’ensemble des praticiens du royaume
(plus d’un millier) et sa place de porte-parole auprès des plus
hautes instances de la santé et sécurité au travail.
Par ailleurs, la Société marocaine de médecine du travail et
d’ergonomie (société savante regroupant médecins, ergonomes,
ingénieurs sécurité…), présidée par le Professeur Chakib
Laraqui, reconnait au CONAMET cette représentativité et
l’associe à la présidence de sa propre journée nationale.
Le CONAMET est acteur et partenaire des événements en santé et sécurité au travail au Maroc et à l’étranger, notamment le Forum national du 26 avril - organisé dans le cadre de la Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail – et le Forum des étudiants de la prestigieuse école Hassania des ingénieurs, organisé le même jour. Sur le plan international, le CONAMET a donné des conférences en 2011, aux journées internationales méditerranéennes à RENNES et au Congrès/Salon Préventica.
Prév. - C’est le sens du message que vous êtes venu
porter à Préventica Bordeaux en janvier
dernier ?
T.E. - Bien sûr, en tant que médecins du
travail, nous cherchons en toute occasion à promouvoir la santé
et la sécurité au travail. À travers le respect des lois, nous
répondons aux grands enjeux de demain, dont l’environnement
fait partie. Préventica est un porte-parole pour nous :
l’événement est le relai des actions que nous menons dans notre
pays. Alors bien sûr, nous venons chercher des outils, des
moyens, de nouvelles techniques, de bonnes adresses pour faire
progresser la prévention des risques professionnels et
accroitre la qualité de vie au travail dans notre pays. Mais
avant toute chose, Préventica est pour nous une immense
plate-forme de rencontres et d’échanges avec nos homologues
français et européens, avec des organismes et des
professionnels de la prévention.
Tariq
Essaid
- Docteur en médecine
- Master en droit public
- Diplôme d’université de médecine du travail et
d’ergonomie
- Diplôme d’université de métrologie des ambiances
physiques en milieu du travail
-Expert technique et auditeur en Santé et Sécurité au
Travail (SNIMA) NM 00.5.801 équivalent OHSAS
18001
-Expert technique en conformité sociale (SNIMA) NM
00.5.601
- Expert National ISO 26000